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A. Assoumani (Comores): «Le problème de Mayotte impacte la relation France-Comores»

Azali Assoumani, élu en mai dernier président des Comores, vient d’achever une visite en France au cours de laquelle il a rencontré son homologue François Hollande et parlé développement. Mais cette rencontre a aussi été l’occasion pour le président comorien de tenter de relancer le règlement du contentieux autour de Mayotte, irrésolu depuis 41 ans. Azali Assoumani répond à RFI.

RFI : Le principal point de désaccord entre votre pays et la France reste l’île de Mayotte, aujourd’hui un département français. Qu’avez-vous dit sur ce point à François Hollande ?

Azali Assoumani : Je lui ai dit ce qu’on a toujours dit au niveau des Comores. La bonne relation entre la France et les Comores passe par trouver une solution à ce problème. Parce qu’effectivement, il y a un acquis qu’il ne faut pas négliger. Ça fait quarante-et-un ans qu’on a ce contentieux, mais on a de très bonnes relations avec la France. Effectivement, ce contentieux-là on en a toujours parlé. Mais cette fois-ci, je dis à la France que le moment est venu. Parce que c’est de l’intérêt des deux pays de trouver une solution à ce problème, sinon malheureusement, ce qui peut advenir peut nous culpabiliser. Maintenant, nous sommes responsables, mais il faut éviter à ce qu’à un moment donné on soit coupables. On est indépendants parce que les Nations unies l’ont accepté, avec les quatre îles. Malheureusement, il y a eu ce contentieux, la France a continué à administrer Mayotte, donc nous à chaque fois on s’en plaignait au niveau des Nations unies. On avait un écho favorable, mais le constat c’est que sur le terrain ça n’apporte pas de solution. Au contraire ! Parce qu’on est parti d’un territoire d’outre-mer à un département, ce qui complique encore les choses. Donc ça veut dire qu’il va falloir un dialogue pour qu’on s’entende sur une solution. Nous aux Comores on est prêts à toutes les propositions. Et là aussi, je ne peux pas oublier mes frères mahorais. Je les respecte, je les aime beaucoup, ils le savent. Donc là effectivement, les Mahorais, ça fait quarante-et un an qu’ils vivent sous une autre nation politique, nous on veut les rassurer qu’on peut vivre ensemble. On est preneurs de toutes les propositions qui peuvent être faites, de façon à ce que ça aille de l’avant pour l’intérêt du département.

Que vous a répondu le président Hollande ?

Quand deux présidents se voient, il faut attendre les résultats. C’est compréhensible. Mais le problème qui sévit depuis quarante-et-un ans, ce n’est pas dans un Claquement de doigts qu’on peut donner un résultat ! Le fait qu’on se soit écoutés et qu’on a mis en place un haut comité paritaire pour ce problème-là, ça veut dire que nous attendons que cette structure composée de Comoriens et de Français, ensemble, vont discuter. Et puis on leur a dit qu’il n’y a pas de question taboue ! Vous devez tout étudier et nous amener les réflexions que vous avez faites et c’est à nous de voir comment on va les mettre en application. Mais là, il y a du pain sur la planche. Parce qu’n a mis beaucoup de pression pour que les choses aillent vite. La solution en 75 aurait été moins difficile qu’en 85 et ainsi de suite. Donc ça veut dire qu’il vaut mieux s’atteler maintenant pour empêcher que ça devienne un pas très, très difficile.

Ces derniers mois, de nombreux Comoriens installés à Mayotte ont été chassés de chez eux, parfois battus par des comités d’habitants. La France a-t-elle échoué à les protéger ?

Ce qu’on a senti c’est qu’il y a eu de victimes. C’est vrai, il a manqué un peu de prévention. Mais on a constaté aussi que l’Etat français a tout fait, même s’ils ont mis du temps. Mais quand même, on a tout fait parce que maintenant le calme est rétabli. Ce sont des évènements malheureux, donc des mesures ont été prises. J’espère surtout qu’on va prendre des mesures préventives.

Le président français a rappelé sa volonté de renforcer la lutte contre l’immigration illégale vers Mayotte. Allez-vous contribuer à cette politique pour empêcher les départs ?

Dans cette question, il y a une question d’esprit et de l’être. L’esprit, c’est l’immigration clandestine. Je refuse parce que pour moi c’est la circulation des personnes à l’intérieur de leur pays. Nous on est insulaires. Ça aurait été un pays comme continent… Je ne pense pas que quelqu’un qui passe de Marseille pour venir à Paris on dit immigration ! Par contre, maintenant l’être, on ne peut pas être insensible à des gens qui prennent des risques à leur vie. Donc là on a le droit, même le devoir, d’empêcher ça. Parce que c’est vrai, Mayotte chez nous, mais en y allant on a pris des risques. Donc c’est à nous de trouver les moyens de convaincre ces Comoriens. Ça veut dire les motifs qui les amènent à Mayotte, comment on peut faire en sorte de réduire un peu ces motifs-là ? Ça, c’est que je j’appelle l’être. Maintenant l’esprit, personne ne peut empêcher quelqu’un d’aller voir sa famille. Il n’y a aucun Comorien qui puisse accepter qu’aujourd’hui, nous avons un seul pays lié par le sang, la religion et tout nous lie, aujourd’hui il y a un visa qui empêche d’aller… Ça, c’est inacceptable, c’est incompréhensible.

Les Comoriens sont nombreux à partir vers Mayotte, parfois pour y faire naître un enfant et s’assurer qu’il ait la nationalité française. Mais souvent simplement pour s’y faire soigner. Qu’avez-vous mis en place depuis votre élection pour relever le système sanitaire ?

Je vais être honnête. Ce n’est pas seulement la santé. Il y en a qui y vont pour chercher un emploi. Donc ça veut dire que nous avons des problèmes aujourd’hui, ce que nous, on reconnaît. Mon gouvernement et moi-même avons établi un programme de relance économique qui vise à permettre à ce que cette jeunesse-là puisse rester d’une façon quiète dans leur pays. C’est-à-dire l’éducation, un emploi professionnel. Donc nous, on ne vise pas seulement la santé. Parce que c’est vrai, il y en a beaucoup qui vont pour des questions de santé. Ça n’engage que vous, ceux qui veulent la nationalité en tout cas beaucoup n’ont pas besoin d’aller à Mayotte. Si on n’a plus de 300 000 Comoriens, pour la moitié ils ont la double nationalité sans aller à Mayotte. Mais c’est vrai, les motivations comme je l’ai dit, et que ce soit la santé, que ce soit l’emploi, on a à faire un effort. Et pour cela, on a demandé l’appui de la communauté internationale dans un cadre d’un programme de développement qui puisse satisfaire le nécessaire vital pour cette population, pour qu’on garantisse leur devenir.

Durant votre visite, François Hollande a annoncé l’instauration d’une mission d’écoute pour la France et l’Union européenne pour appuyer cette aide au développement. Quels en sont les axes prioritaires ?

D’abord, c’est vrai, cette mission a été lancée, mais nous aussi on a essayé de convaincre la France qu’il y a une coopération bilatérale avant qu’elle soit multilatérale. Nous de ce côté-là, effectivement, on s’est mis d’accord et les axes prioritaires qu’on a dégagé : l’éducation, parce qu’il va falloir former cette jeunesse. Nous avons 70% de jeunes et pour le moment on comptabilise plus de 25% au chômage. Il va falloir qu’on dirige ces études vers un métier professionnel. Et puis aussi il faut l’énergie parce que c’est pour l’avenir de la population, mais aussi convaincre les opérateurs économiques. Et puis aussi la santé parce que malheureusement aux Comores, pour un rien on est obligé de se déplacer pour aller dans un pays voisin. Dans les autres axes, c’est convaincre le potentiel touristique que nous avons dans le pays.

 

Par Laura Martel RFI
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1 commentaire sur A. Assoumani (Comores): «Le problème de Mayotte impacte la relation France-Comores»

  1. Je pense que Imame AZALI n’a pas pu répondre aux journalistes les questions posées.En parlant du développement des Comores,il n’y a pas 36 solutions.Une seule et unique solution,c’est l’acceptation de la France de sa présence illégale dans un pays indépendant oû elle ronge et freine toute bonne initiative de développement.C’est ça la vraie question.

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