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Au palais, les pinceaux emmêlés…

Opinion: La forfaiture est têtue. Conduite par un train d’enfer, rien n’aura pu la dérailler. Si bien que sur son chemin, tout y est passé. Elle a tout défait. La République, défigurée; les institutions, neutralisées, jusqu’au suffrage universel, confisqué.

Mais voilà, hélas pour les auteurs du forfait, le droit aussi est têtu. Si bien qu’après avoir festoyer pour la réforme constitutionnelle, les voici embourbés dans un schmilblik juridique difficile à démêler. Docteur Frankenstein s’est emmêlé les pipettes. Au laboratoire, ses acolytes semblent ne rien y comprendre. Qu’ils se rassurent, dehors non plus.

Voici un arrêté d’un modeste coordinateur qui vise une constitution nouvelle quelques jours après que des décrets du Chef de l’Etat lui même, eux ont visé une constitution révisée

On a ainsi réussi la prouesse juridique de se retrouver, au meme moment, régit par deux Constitutions. Tantôt l’on vise celle de 2001, tantôt celle de 2018. Pour la première, on dit c’est parce qu’elle est révisée, pour la seconde on affirme que c’est parce qu’elle est la nouvelle. La République devenu l’hydre à deux têtes.

Mais revenons à l’acte juridique du jour, l’arrêté du coordinateur de l’action gouvernementale. Juridiquement exquis !

Comment dire? C’est selon la tête de l’hydre. Au regard de la Constitution de 2001, le coordinateur est une fonction usurpée. Au regard de celle de 2018, c’est une fonction tout bonnement inexistante.

Usurpée pour 2001, parce la constitution d’alors était claire. La coordination de l’action du gouvernement est une compétence exclusive des vice-présidents (anc. Art 15). Chacun des trois coordonnant cette action dans l’île dont il est originaire. C’est même la seule fois que la Constitution de 2001 mentionne expressément l’origine insulaire. Donc, le coordinateur de l’action gouvernementale exerçait jusqu’alors un pouvoir qui n’était pas le sien.

Inexistante en 2018, puisque désormais les vices-présidents sont supprimés et avec eux leur prérogatives. Y compris cette prérogatives de coordination de l’action gouvernementale dont ils jouissaient. Pouvoir disparu, pourtant exercer aujourd’hui.

Puis, à ne pas s’y méprendre, ça ne rentre que difficilement dans les affaires courantes. Celles-ci ne concernent que les compétences du gouvernement, or ici il s’agit d’une compétence du vice-président en tant que vice-président et non en tant que ministre. Peut-être rentre-t-il dans la continuité de l’Etat si l’on considère que changer de coordinateur d’une radio etait une nécessité impérieuse pour les intérêts de la Nation. On peut en douter.

La constitution dispose que le président nomme le gouvernement (Art. 117, al 2). Autrement dit sans délai, ou au moins dans un délai raisonnable puisque le present de l’indicatif en droit equivaut à de l’impératif. Mais 19 jours après, on a toujours un gouvernement démissionnaire.

La constitution dispose que toutes les dispositions anciennes et contraires aux nouvelles sont abrogés(art. 117, al. 1)). Mais voilà qu’on applique une prérogatives d’une institution ancienne abrogée par la constitution nouvelle.

La période n’est pas transitoire, elle est paradoxale. Les juristes du palais seraient bien avisés de nous en sortir.

Mohamed Rafsandjani

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