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« Cela fait 37 ans que nous nous connaissons »

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LETTRE A MON AMI, MAMADOU
Cher ami,

Cela fait 37 ans que nous nous connaissons et que nous avons noué des relations quasi fraternelles.

Pour ces raisons, après 10 ans d’absence, je suis revenu au pays en 2010 pour soutenir ta candidature et tu as été élu.­

J’ai cru que les choses allaient changer,  qu’un jeune président, épaulé par ton expérience de 32 ans au service de l’état allait enfin sortir le pays du marasme social, économique et moral dans lequel il  est plongé depuis  15 ans.

Cinq ans plus tard, c’est la désillusion totale. Tu as totalement changé, tu  ne crois plus au pays, mais à des forces obscures  qui ne sont pas nécessairement animées de bonnes intentions pour le pays qui est malgré tout le tien.

Réfléchis bien  car tu as consacré 37 années de  ta vie à   ce pays,  tu lui  as donné le meilleur de toi-même, en commettant des erreurs certes,  mais  tu as aussi réalisé de  bonnes choses et l’histoire est seule juge. Moi, je le sais puisque j’en étais témoin  au début de ta carrière.

Réfléchis car tu as très peu d’amis sincères autour de toi. Tes compagnons actuels se sont arrangés pour faire le vide autour de toi pour se faire une place et tu te retrouves ainsi, otage d’intérêts égoïstes et  victime de stratégies qui te dépassent, stratégies  visant à déstabiliser notre pays  dont tu dois être l’instrument.

Je te prie de  jeter  un coup d’œil sur les résultats du 1er tour de l’élection du gouverneur à Anjouan, car tu t’apercevras  que, sans  exception, tous les bureaux victimes de sabotage, sont des bureaux où le candidat du Juwa était en tête.

Tu conviendras avec moi, que ce candidat et ses alliés  n’avaient donc aucun intérêt à perturber le scrutin dans des bureaux où ils étaient assurés de gagner. La réalité  c’est que tes partisans essentiellement des membres de bureaux de vote,  ont voulu faire un bourrage d’urnes et en ont été empêchés par la population qui ne l’a pas supporté.

Sache également au cas où on ne te l’aurait pas dit, que des conseillers à la Cour Constitutionnelle étaient présents  sur le terrain à Anjouan  et qu’ils ont tout vu et tout enregistré.

Que des observateurs internationaux ont également

pu voir ce qui s’est réellement passé en même temps qu’eux.

Par contre aucun d’eux  n’a  pris  la peine de confronter ses observations aux résultats du 1ER

tour pour mieux comprendre la réalité   sur  ce qui s’est passé.

Prends donc la bonne décision et ne te laisse pas entrainer, instrumentaliser par des gens qui ne  cherchent pas à préserver la paix et la cohésion sociales, ni les intérêts du pays, mais à le plonger  dans le désordre et à  se servir de toi  pour protéger  leurs intérêts au détriment de ceux de ton pays.

Quant à la communauté internationale, nous ne pouvons que saluer les efforts qu’elle a déployés pour sauvegarder la paix et la cohésion sociales dans notre  pays depuis plus de 20 ans.

Toutefois cela ne confère pas à une partie d’entre elle, le droit de décider à la place du peuple comorien,  qui doit diriger le pays. Elle doit rester dans  son rôle d’accompagnement.

Or le sentiment général  induit par les déclarations de tes proches et des responsables de l’UPDC  c’est que celle-ci, t’a déclaré président élu ou pas.

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Et que c’est pour cette raison qu’elle a  fermé  les yeux sur les aberrations des scrutins de 2015 & du 1er tour du scrutin de 2016  parce que cela sert la  stratégie d’une partie de cette communauté.

Comment peut-elle refuser l’application de la loi et imposer des règles sur mesure,  inédites ailleurs avec le risque de plonger notre pays dans des troubles à l’issue incertaine, et  priver le peuple  de la liberté de choisir ses  dirigeants ?

Nous ne voulons  pas  qu’une ONG, parce qu’elle gère des fonds  d’une organisation inter étatique, qui a ses intérêts,  serve  d’instrument à un groupe  pour décrédibiliser un processus électoral dont elle avait la charge sur le plan technique, en lieu et place du PNUD.

Cette agence des Nations Unies  a été évincée malgré l’expérience nationale et internationale acquise en matière d’élection  dans notre pays, de  2002 à 2010  sans problèmes majeurs.

Ce qui est loin d’être le cas depuis 2015.

Tu sais que beaucoup de dysfonctionnements ont émaillé les élections de 2015 et celles de 2016.C’est à dire depuis l’éviction du PNUD.

Ceux qui veulent  faire des élections partielles  aujourd’hui  à Anjouan, parce qu’il y aurait des problèmes dans  quelques bureaux de vote savent parfaitement que dans une élection générale comme la présidentielle, 13 sur 723 bureaux, ne représentant que 2,49%  des inscrits ne sont pas de nature à invalider l’élection.

Seuls pourraient être repris, les bureaux annulés par la Cour Constitutionnelle, s’ils aboutissent à l’inversion de l’ordre des résultats tels que proclamés par la CENI.

Ce sont les mêmes qui ont  installé les maires en les faisant désigner par les chefs de village nommés  par le ministre de l’intérieur en lieu et place des conseillers communaux élus, ce qui est

anticonstitutionnel.

C’est encore eux qui ont installé  le président de l’assemblée manu militari,  qui crient au  coup d’état  parce que la CENI a fait son travail, tout simplement parce que les résultats ne sont pas en leur faveur.

Nous, c’est-à-dire les 25 candidats à l’élection présidentielle, et tu y étais, avons été conviés à une réunion à la gendarmerie par le chef d’état major, pour nous informer que pendant la période électorale, les forces armées seront placées sous l’autorité exclusive du président de la CENI.

Pourquoi donc cet amalgame, lié à la présence du chef d’état major à la CENI ?

Heureusement que le pays peut encore compte  sur des responsables comme lui, qui pensent à l’intérêt du pays.

Pourquoi lorsque plus de 45% des électeurs,  soit environ 9000 électeurs  ont été  privés du droit  de vote à Moroni au 1er tour du double scrutin du 21 février 2016 par des magouilles sur les listes électorales, pourquoi quand les villages de Dzahani, de Salimani ont refusé de voter,  n’avez-vous pas demandé une élection partielle dans ces cas qui ont  impacté plus fortement les résultats?

Pourquoi avez vous refusé, l’annulation de l’élection du gouverneur à Ngazidja lorsque nous l’avions demandé?

Nous pourrons  déplorer que la communauté internationale ait fermé   les yeux face aux résultats truqués ayant été à l’origine du mouvement Nara Wazé et pire  qu’elle se soit  empressée d’aller féliciter le président de l’assemblée,  installé dans des conditions inacceptables et anti démocratiques.

Elle  sait  qu’il ne peut pas y avoir une élection partielle dans une élection générale nationale. Pourquoi certains de ses membres s’entêtent ils à parler de financer des élections partielles via les candidats de l’UPDC?

Le peuple comorien sait que si tu étais à la place d’AZALI, leur attitude aurait été autre.

En fait,   en leur sein il y a des gens qui  veulent nous imposer une transition dans  le pays,  ce qui immanquablement   nous monterait  les  uns contre les autres et au final,  mettrait  fin à la stabilité qui a prévalu depuis  14 ans parce que son maintien nous donnera la possibilité de réfléchir sereinement  sur les perspectives de reconstruction du pays et de le faire renaitre de ses runes.

Car c’est inacceptable  qu’une partie de celle-ci  veuille entrainer toute la communauté internationale vers cette dérive, ce dévoiement  de  sa  mission.

Tu sais que je suis l’initiateur du premier regroupement des 23 candidats qui a abouti à la modification du cadre de concertation et à la signature du Communiqué  entre les 23 candidats et le président de la CENI,  ce  qui a permis au 1er tour de se dérouler dans la sérénité.

Tu sais également que le mouvement Nara Wazé qui a regroupé 20 candidats,  est né de mon initiative et que le protocole de sécurisation du processus mis en œuvre dans le cadre du 2eme tour, a été proposé par le mouvement Nara Wazé.

Autrement dit, nous responsables comoriens,  avons été capables de nous entendre par consensus pour sauver le processus électoral,  la paix et la stabilité dans notre pays.

Mon cher ami, n’écoute pas ceux qui sont prêts à sacrifier la paix et la cohésion sociales parce qu’ils veulent le pouvoir ou défendre des intérêts particuliers, quitte à plonger notre pays dans le chao.

Je te rappelle que cela fait 25ans que nous avons adopté la démocratie comme mode de gouvernement.

D’autres pays au sein de la communauté internationale, ne sont pas encore  arrivés au stade des Comores,  malgré nos imperfections.

Muré dans ces certitudes qu’une partie de cette communauté te soutient, toi et tes alliés de circonstances  avez  déjà annoncé que tu seras le futur  président élu ou pas.

Tu n’as donc  pas écouté l’exaspération de ton peuple, sa colère qu’il a pour le moment traduites par le rejet de ta candidature  à plus de 82%, du jamais vu pour une équipe au pouvoir depuis 10 ans avec la débauche de moyens et des sommes d’argent hors normes pour des résultats aussi médiocres.

Alors reprends tes esprits,  n’écoute pas les oiseaux de mauvaise augure,  pense à ton pays et à nos enfants et au pays que tu  voudrais leur laisser.

Quitte cette route dangereuse dans laquelle ces gens veulent t’engager.

Recours aux voies légales pour  défendre tes droits. Je sais que c’est difficile, mais n’accepte pas d’être instrumentalisé!

Prends tes responsabilités en ton âme et conscience pour ne pas être celui qui, dans l’histoire, aura été le vecteur de la division du pays et de la résurgence des vieux démons du séparatisme.

Car il ne peut pas y avoir d’élection partielle dans une élection générale ; et elle n’aura pas lieu à Anjouan.

Défends tes droits devant la Cour Constitutionnelle, mais de grâce ne tombe pas dans leur piège.

Fais donc  attention, car tu t’engages sur une pente dangereuse, en acceptant la rhétorique inappropriée  actuelle de coup d’état, la fuite en avant des manifestations, de cautionner les propos irresponsables d’incitation à la  haine et à la violence de ton vice président qui a demandé, lors de votre meeting  du 19 avril à Moroni,  de gifler quiconque serait d’un avis contraire à la position  de l’UPDC et tu fais prendre au pays des risques que peut être tu ne mesures pas.

Car c’est la première fois au monde  qu’un gouvernement qui a désigné ses vice présidents, son ministre, ses directeurs généraux comme candidats, manifeste pour protester contre la décision légale d’une institution qu’il a mise en place parce que celle-ci  a appliqué la loi!

Je te rappelle que le  président Azali ne dispose d’aucun membre à  la CENI et ses démembrements ou  à la cour constitutionnelle, tous nommés par ton gouvernement, les gouverneurs et l’ancien président de l’assemblée qui tous sont de ton côté!

Tous étaient candidats donc juges et parties et cela n’a ému personne!

Bien  à toi ton ami,

IBRAHIMA Hissani Mfoihaya

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3 commentaires sur « Cela fait 37 ans que nous nous connaissons »

  1. Merci Ibrahim,vous êtes un homme d’Etat,le pays a besoin des gens comme vous.Que Mamadou se débarasse des ses meilleurs ennemis qui le conseillent au profit de notre jeune democratie.
    Bravo Ibra

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