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Ces familles, c’est nos familles, leur souffrance c’est la nôtre

Sous mes yeux plusieurs dizaines de familles, entassées là ; femmes, enfants et personnes âgées gisent, étendus à même le sol. D’autres ont trouvé miraculeusement le sommeil, surement la fatigue ne leur a pas laissé le choix. Des femmes s’occupent des enfants, des tout petits, surement les plus vulnérables.

« A même le sol »

Sous mes yeux plusieurs dizaines de familles, entassées là ; femmes, enfants et personnes âgées gisent, étendus à même le sol. D’autres ont trouvé miraculeusement le sommeil, surement la fatigue ne leur a pas laissé le choix. Des femmes s’occupent des enfants, des tout petits, surement les plus vulnérables. Ils ne doivent pas comprendre pourquoi ils se retrouvent pour la quatrième nuit à dormir sur le bitume dehors.

Des hommes s’affairent autour d’une table, des reçus sont griffonnés et remis ensuite aux visiteurs qui veulent bien faire un don. Je peux lire « association … 100 euros »,  un billet de 10 euros dans une boite dans un verre en plastique, et quelques pièces, ça fait pas beaucoup pour nourrir ces familles dans la détresse. Je donne quelques billets, ça ne fera surement pas bouger les choses, mais c’est un geste.
« Plus d’école, ni de brevet »

Des enfants étendus, à même le sol. Ils sont entre 4 et 10 ans, ils ne doivent plus aller à l’école depuis les évènements, et ils doivent avoir beaucoup de questions à se poser. Pourquoi dormons-nous dehors, qu’allons-nous devenir …  Et pour ceux qui sont en troisième, ou le bac  c’est le rêve de décrocher son brevet ou son bac qui s’arrête net.

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« C’est les Comoriens qui sont visés »

Un des agents de sécurité discute avec moi, il me dit « c’est triste ce qui arrive, mais la chasse aux étrangers qu’on entend, en réalité, ce n’est pas les étrangers se sont les Comoriens qu’on chasse. » A côté de lui des hommes, la trentaine, s’approchent. Ils intéressent à la discussion, un peu en retrait au début, puis peu après les langues se délient : « j’ai assisté dans le sud à la traque, si on a une épouse mahoraise, ou un mari mahorais on y échappe. » Lance l’un d’entre eux, dépité. « Même des femmes avec enfants de père mahorais sont prises pour cible » ajoute-t-il en montrant du doigt des mères de famille dans la foule.

Je leur porte la contradiction en disant qu’il ne s’agit que des personnes en situation irrégulière et qui en plus occupaient illégalement des terrains privés. Non, monsieur me rétorque un des interlocuteurs. «Une bonne partie de ces familles ont leurs papiers, et avaient payé leurs loyers, mais ils sont expulsés, pourchassés, traqués comme des chiens parce qu’ils sont Comoriens. » A-t-il répété avant de lâcher « la seule chose qui n’est pas arrivé, Alhamdoullah, c’est que ces gens n’ont pas été ramassés en plusieurs morceaux, mais le calvaire on leur fait vivre ça ».

Devant ces images de familles abandonnées là, tel un spectacle sous les yeux des passants et curieux, on ne peut que ressentir un pincement au cœur. Cette famille aurait pu être la mienne, ça aurait pu être nous, leur malheur c’est le nôtre, leur souffrance est la nôtre, comment détourner les yeux devant cet enfant et que lui dire … ?

Cheikh HASSANE

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