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En toute sincérité : L’amour en liquidité !

Notre époque traîne ses tares. Le pourrissement des valeurs est si profond que le vote de la loi contre la corruption et infractions connexes fait sourire. Ce que l’on appelle amour et qui agite l’être humain et l’expose à toutes les folies, est déjà envahi par la corruption. Les soi-disant cœurs saignant d’amour n’échappent plus à l’asservissement de l’argent.

Décidément, l’évolution du monde entraîne avec elle, celle de la perversion des sentiments. L’amour n’est plus visiblement sous le seul contrôle du cœur. L’intérêt oriente la balance et la prend en otage. Le baromètre se moque de la raison du cœur. On est témoin du spectacle mercantile des tourtereaux. La cascade de ruptures pour question financière.

L’autre jour, une jeune fille ébouriffée et noyée de sueur, crachait des injures sur le supposé être aimé, en pleine rue sous le vent vespéral. Elle injectait de sarcasmes devant le pauvre type tout en sanglot, qualifié alors d’incapable et d’insouciant. La seule faute de l’amoureux humilié : la sécheresse de sa poche à l’heure où le besoin presse la femme ambitieuse. Le réquisitoire contre le partenaire défaillant est assorti de menace de rupture. Le langage de l’argent se hisse au sommet de la mode. Argent et rien que l’argent. Voilà le bouillon de culture de la muflerie de cette mendicité déguisée.

Victor Hugo était en avance sur notre siècle quand il évoquait la glissade peu scrupuleuse de la femme  » obligée de se vendre aux hommes ». Il y en a qui vivent de leurs plaies béantes et profitent de tout, même du mépris. Le nouveau troc prend une ampleur déconcertante. Le matériel contre le sexe. Comme des « mendiants accrocheurs » contre lesquels s’indigne Ahmadou Kourouma.

La société des amoureux est plongée dans des simulacres qui permettent à chaque acteur de jouer son rôle dans le grand théâtre d’ombre des sentiments. La comédie est à son comble à l’heure de la période de vaches grasses du partenaire financièrement outillé. On déborde d’imagination dans les câlins et les mots doux. Brutalement, l’être plongé dans l’amour tendancieux est frappé d’amnésie en situation de difficulté prononcée de l’élu artificiel de son cœur. La femme aimée, consciente d’être follement aimée, pousse des ailes et monnaye ce statut. On torture son partenaire avec de gigantesques exigences assorties d’ultimatum. Le sourire et les meilleurs sentiments de cette race de femmes sont dictés par la générosité de l’homme. Point de concession sur l’argent. L’illusion d’être aimé ou la fausse sensation d’aimer continue d’alimenter les relations.

Puisqu’elles ont révélé leur goût hors norme pour l’argent, certains hommes bien inspirés empruntent le chemin de la ruse pour les soumettre à de douloureuses expériences marquées par des résolutions punitives. Les bourreaux promettent la lune à ces femmes sangsues et autres mange-mil. Sous le fardeau de la naïveté et de la cupidité, elles croient au père Noël et offrent le bien congénital et précieux aux dragueurs plein d’imagination et bourrés de mensonges. Les farceurs de l’amour font d’elles leur chien de Pavlov. Naturellement, on rigole à l’idée de la sécrétion psychique, de l’expérience, de l’acquisition et la perte des « réflexes conditionnels ». C’est au labo de la cruelle démagogie qu’on tourne en rond ses obsédées de l’argent.

Le corbeau se croyant le Phénix des hôtes de bois cède aux flatteries du renard et lâche le fromage. « Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ». La leçon de la Fontaine vaut pour nos petites qui laissent tomber la proie au bonheur de l’homme pressé par la libido. Le piège vient d’une démagogie rapportant le ramage au plumage sous l’odeur alléchée du fromage. Le fabuliste avait pourtant prévenu.

Que dire de cette espèce de fillettes ou d’adolescentes ou de femmes escrocs, qui excellent dans l’art d’oublier les bienfaits de la veille. La fête passée, adieu le Saint ! Vive l’ingratitude de nos pintades qui criaillent sous l’effet d’une amnésie sélective. Mon étonnement est immense et sans mesure devant l’amoureuse paresseuse, oisive et qui ne mise que sur la bonté de l’être aimé pour assurer sa ration alimentaire. On en trouve au comportement insolite : joyeuses lors du gain de l’argent mais plaintives dans le lit sous le coup de boutoirs frénétiques de l’impitoyable bienfaiteur plein d’énergie.

L’argent influence la santé de l’amour. La nouvelle génération en a décidé ainsi. Sans pudeur, on brise les valeurs. Au mieux des cas, le feu de l’hypocrisie dévaste les engrais de l’impératif moral. Le chantage prend le contrôle de l’amour. Les amoureux niais bombent le torse sous une galanterie forcée. Le prix à payer pour sauver l’amour vire plutôt à l’humiliation.

Le rêve du retour aux fondamentaux de l’amour est toujours permis. Mais qu’on n’essaye surtout pas d’avoir foi en l’illusion. Il serait sage de se comporter comme si l’amour, pour exister a besoin de l’oxygène de l’argent. C’est une question d’époque. La nôtre compose avec cette amère vérité du matérialisme. On doit simplement en appeler à la tolérance de la femme et au sens de devoir des hommes.

Sulpice O. GBAGUIDI, Quotidien Fraternité

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