En ce moment

Escalade des combats à Goma, au Congo

Un soldat du groupe rebelle M23, le 17 octobre à Rangira.

En trois jours, la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) est en train de déraper. Les combats qui avaient éclaté jeudi entre les forces armées congolaises (FARDC) et les rebelles du M23 avaient été violents, mais circonscrits à la région de Kibumba, une zone située à une vingtaine de kilomètres au nord de Goma, la capitale régionale. Pendant trois mois, les deux camps s’étaient regardés en chiens de faïence depuis leurs positions au milieu de la brousse, malgré quelques accrochages sans lendemain.

Depuis jeudi, les engagements sont passés à un niveau supérieur. Samedi matin, les forces rebelles ont attaqué dés quatre heures du matin et enfoncé les positions gouvernementales, prenant Kibumba et avançant en direction de Goma. Sur leur route, se trouve le grand camp de déplacés de Kanyarucina, que les habitants sont en train de quitter pour fuir vers Goma.

L’armée congolaise, ou l’un de ses alliés dans la région (parmi les nombreux groupes armés qui se sont renforcés ces derniers mois), est engagée contre les rebelles sur d’autres axes. Dans les environs de Kiwandja, par exemple, une petite ville qui donne accès à Rutshuru, la  » capitale «  du M23. Mais aussi sur dans d’autres zones plus proches de Goma, comme les environs du volcan Nyiragongo.

A ce stade, Goma ne s’estime pas menacée mais la situation évolue très vite. Compte tenu de l’urgence, la mission des Nations unies, la Monusco, devrait commencer à appuyer militairement les FARDC pour défendre Goma. Certaines sources affirment que des hélicoptères et des blindés de l’ONU sont déjà en train d’attaquer les forces du M23 dans la zone de Kibumba.

Dés jeudi soir, Justin Paluku, le gouverneur du Nord Kivu (région de l’est, frontalière du Rwanda et de l’Ouganda, où s’est développé la rébellion), avançait le chiffre de 113 rebelles tués dans les premiers affrontements. Samedi, u

ne source humanitaire évaluait à  » plusieurs dizaines «  le nombre de victimes militaires, en plus des nombreux blessés. Et les combats continuaient.

Une congolaise et son enfant devant un tank de l'armée gouvernementale, à Rugari, à 37 km de Goma, en juillet.

Depuis plusieurs jours, chaque camp semblait se préparer à un affrontement. De plus, la zone tenue par le M23 inclut aussi le poste frontière de Bunagana, qui ouvre sur l’Ouganda, mais a permis, comme l’ont mis en évidence une série de rapports des Nations unies, le passage de troupes et de matériel en provenance du Rwanda.

Le Rwanda a réfuté, sur le fond comme la forme, les rapports successifs des Nations unies, mais ces accusations sont prises au sérieux par de nombreux pays. La Belgique, partenaire de Kigali, vient d’annoncer la suspension de sa coopération militaire avec le Rwanda. Des tranches d’aides, relativement symboliques, ont été suspendues par des pays « amis », à commencer par les Etats-Unis.

Dans ce contexte, la rébellion du M23 est-elle condamnée à agir, pour éviter d’être étouffée par les forces congolaises dans une « poche » de la région de Rutshuru ? Un jour avant le déclenchement des hostilités, dont chaque camp rejette sur l’autre la responsabilité, les autorités congolaises avaient obtenu que l’Ouganda ferme sa frontière de Bunagana. Les recettes d’une douane comme celle-ci se chiffrent en millions de dollars, et offraient jusqu’ici la principale porte vers l’extérieur de la zone rebelle.

L’Ouganda, mis également en cause dans les rapports des Nations unies aux côtés du Rwanda, donne en fermant Bunagana un geste de bonne volonté. Le porte-parole du gouvernement rwandais, Lambert Mende, appelle la communauté internationale à cibler des responsables rwandais – nommés dans les rapports – lors de la prochaine réunion du comité de sanctions. Jusqu’ici, seul Sultan Makenga, le chef du M23, a été frappé par des sanctions américaines.

Pendant les trois mois de trêve, des réunions de pays de la région dans le cadre de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs (CIRGL) ont esquissé la mise en place d’un dispositif impliquant les pays voisins. Ce dispositif n’a, en bonne logique, donné naissance à aucun résultat.
Le M23 a appelé le pouvoir congolais à s’asseoir à une table de négociation. Mais dans le même temps, les FARDC comme le M23 ont renforcé leurs alliances avec des groupes armés de la région, au Nord et au Sud Kivu (voir les articles du Monde du mois d’août). A présent, l’activation de ces groupes, dont certains se livrent déjà à des attaques locales et meurtrières dans la région du Masisi comme dans le Rutshuru, pourrait faire éclater l’enfermement du M23 et entraîner une vague de violence aigue dans l’est du Congo.

Comoresinfos est un média qui a vu le jour en avril 2012 et qui depuis lors, prône l'indépendance éditoriale. Notre ferme croyance en l'information de qualité, libre de toute influence, reste un pilier essentiel pour soutenir le fonctionnement démocratique.

Soyez le premier à réagir

Réagissez à cet article

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


error: Content is protected !!