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Farahati Moussa, « c’est tellement beau d’être une femme… »

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A 33 ans, Farahati Moussa est titulaire d’un master 2 professionnel en Droit et gestion des risques sociaux et de santé,
obtenu à l’Université de Bretagne Occidentale. Après ses études en France, elle a choisi de regagner les Comores pour servir son pays. En si peu de temps, l’enfant d’Iconi s’est imposée par son savoir-faire. Celle qui a aussi fait des études de Droit au Maroc a accepté de nous parler de son expérience en France en passant par le Modec et dans la force Est-africaine de maintien de la paix. Cette actuelle responsable juridique de Moroni Terminal, nous répond à coeur ouvert. Micro.

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Un première expérience en France…
Ma première expérience professionnelle a été au sein d’une association d’aide aux victimes d’infractions pénales. En tant que travailleur social, notre mission c’est de tendre la main à ceux qui en ont besoin. Cette assistance se traduit d’abord par une grande capacité d’écoute et de compréhension, un peu une sorte de psychologue qui rassure les victimes dans les moments difficiles, la gestion du procès judiciaire. J’ai eu à faire à des femmes battues qui hésitaient entre main courante, plainte et représailles. Des sortants de prison que je devais aider à préparer leur réinsertion sociale et professionnelle, des parents orphelins de leur fils, à qui la banque réclamait le paiement d’un crédit contracté par leur fils de son vivant. Vous devez gérer le deuil de votre fils parti prématurément et la pression psychologique et financière de la banque.
Ensuite, j’ai intégré un cabinet d’avocat spécialisé sur le droit social et le droit des étrangers. En lien direct avec les clients, cela n’a pas toujours été facile de rencontrer des personnes en situation irrégulière sur le point de se faire expulser, parfois des familles toutes entières. Des personnes licenciées abusivement, des personnes sur le point de se faire expulser de leurs logements…puis j’ai commencé à développer un ulcère d’estomac à rencontrer quotidiennement des personnes en difficulté.

Aux Comores aussi…
Un soir, en rentrant du travail, je refaisais le bilan de ma journée, une petite voix intérieure m’a dit « retournes dans ton pays, tu seras plus utile la bas ! ».
Ma décision fut prise à l’instant même et un mois après je me suis retrouvée aux Comores.
Aux Comores, le hasard m’a ramené vers un domaine plus enthousiaste et rempli de défis…la défense des intérêts du secteur privé. J’ai intégré la plus grande organisation patronale du pays, l’OPACO, en tant que juriste de 2011 à 2012, ensuite l’organisation rencontrait des difficultés structurelle et fonctionnelle au point de l’empêcher de remplir sa mission principale qui est la défense des intérêts du secteur privé. J’ai alors intégré le programme de l’IFC Banque de la Banque Mondiale relatif à l’amélioration du climat des affaires et du crédit-bail aux Comores. J’ai participé à la mise en place de plusieurs reformes dans le milieu des affaires : Protection des investissements par l’adhésion des Comores à la MIGA Agence multilatérale de garantie des investissements, filiale de la Banque Mondiale, cette agence a pour mission de garantir les investissements directs étrangers (IDE) dans les pays en développement, la facilitation de l’accès au crédit par l’adoption de la loi sur le crédit-bail, la facilitation de la création d’entreprise par la simplification des procédures et réduction des délais, aujourd’hui on peut créer une entreprise en 72h et à moindre coût en s’adressant à un guichet unique (ANPI ou UCCIA), la facilitation de l’immatriculation des terrains bâtis et non bâtis à seulement 10 000f symboliques.
Evidemment, s’agissant de reformes (changements) certaines se mettent en œuvre plus facilement que d’autres, mais la base est là, les textes.

Le passage au Modec?
En 2014, les organisations du secteur privé renaissent de leurs cendres sous un nouveau nom, le MODEC. J’y ai assuré la Direction Exécutive pendant plus d’une année. Ensemble, nous avons réussi, pour la première fois de l’histoire des Comores, à institutionnaliser le dialogue public-privé par un décret présidentiel. D’autres accords en poche notamment un accord de partenariat avec la douane comorienne, d’autres sont en cours, accord avec le Projet d’Appui à la Formation Technique et Professionnelle, PAFTP, le Centre d’Insertion Professionnelle et Technique de Djomani Mboudé…

Fonctions actuelles…
Actuellement, je suis la responsable juridique de Moroni Terminal, filiale du Groupe Bolloré Logistics.
A mes heures perdues, je suis Coach national en Initiative à Résultats Rapides (IRR). L’IRR est une méthode de travail basée sur une équipe responsabilisée, soutenue par un leader et déterminée à atteindre un objectif de performance (résultat mesurable) dans des délais courts, 100 jours en moyenne. Formée par le Projet ABGE, Appui à la Bonne Gouvernance Etatique financé par la Banque Mondiale, je coache les fonctionnaires comoriens depuis 2013. Mon rôle est de les motiver à travailler efficacement en obtenant des résultats concrets dans des délais courts. Ma dernière intervention a été au sein de la Fonction Publique de l’Union des Comores, sur l’opérationnalisation du logiciel GISE Amélioré (Gestion intégrée des structures et des effectifs).Toutes les personnes rémunérées par le gouvernement comorien doivent figurer sur le logiciel GISE Amélioré, peu importe le statut, fonctionnaire, contractuel, décisionnaire etc….
Ce logiciel gère la paie mais aussi les carrières, et départs à la retraite. L’objectif de ce logiciel est entre autres de minimiser les fraudes, les doublons et en finir avec les états de salaires manuels.

Agent de maintien de la paix…
Depuis 2012, je suis aussi Agent de maintien de la paix de la Force Africaine en Attente Eastern Africa Standby Force (EASF). Il s’agit d’une force de maintien de la paix continentale, et multidisciplinaire, constituée de contingents militaires, policiers et civils qui agissent sous la direction de l’Union Africaine. Je représente mon pays en tant que «juriste femme et civile ». Après avoir suivi plusieurs formations théoriques et pratiques, nous pouvons être déployés à tout moment dans un pays de la région en conflit ou post-conflit afin d’aider à la restauration de la paix.

Un message pour les femmes…

Ne jamais chercher à être l’égale de l’homme, la nature nous a voulu complémentaires.
C’est tellement beau d’être une femme, à la fois douce et solide, si je devais renaître je renaîtrais toujours femme.

Propos recueillis par Salwa Mag

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