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L’art du sumo tombe de haut

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La disparition, le 19 janvier, du yokozuna (« grand champion ») Taiho a offert un moment de nostalgie aux Japonais. Ce fameux rikishi (« lutteur ») fut une véritable légende du sumo. Devenu en 1961 le plus jeune yokozuna de l’histoire, ce fils d’un Ukrainien et d’une Japonaise avait enchanté les fidèles de ces joutes émaillées de rituels shinto qui touchent à l’essence de la culture de l’Archipel. Aujourd’hui, le sumo n’a plus la même aura. Le public des tournois est clairsemé, l’audience télévisuelle diminue, les lutteurs se raréfient. Les jeunes Japonais sont beaucoup moins séduits par la dure vie de sumo qui représentait autrefois une chance d’ascension sociale pour les cadets de familles pauvres, souvent issues des régions du Nord, comme le département d’Akita. En 2012, seuls 56 jeunes gens ont postulé pour intégrer l’une des 45 écuries, contre plus de 200 en 1992.Cette désaffection tient notamment à la domination durable qu’exercent les lutteurs étrangers. Les rikishi autochtones semblent bien avoir perdu la main. Depuis 2006, pas un combattant nippon n’a gagné l’un des six tournois annuels. Le dernier yokozuna japonais, Takanohana, très populaire dans les années 1990 avec son frère Wakanohana, a pris sa retraite en 2003. Les deux yokozunas actuels, Hakuho et Harumafuji, sont mongols. Sur les quatre ozeki (champions), deux sont étrangers, le Bulgare Kotooshu et le Mongol Kakuryu. Le 27 janvier, la dernière grande épreuve de Tokyo a été remportée par le Mongol Harumafuji. L’Association japonaise de sumo (JSA) a tenté d’endiguer cette domination en limitant le nombre d’étrangers à un lutteur par écurie. Le comportement de ces combattants venus d’ailleurs – qui montrent parfois leurs sentiments sur le dohyo (ring) – est souvent considéré comme étranger à la grande tradition.

Pourtant, la suprématie nippone sur le sumo serait d’essence divine, rappelle la JSA sur son site Internet : « Elle daterait de la victoire du dieu Takemikazuchi dans un combat contre le chef d’une tribu rivale. » Ce sport, devenu un divertissement populaire au cours de la période d’Edo (1603-1868), souffre aussi des scandales qui l’ont récemment secoué. En février 2011, la police a mis en évidence l’existence de combats truqués, liée à l’organisation de paris illégaux par la pègre et à la crainte des lutteurs de perdre un grade en cas de défaites trop nombreuses. Dans les derniers jours des tournois, certains auraient « acheté » une ou deux victoires pour s’assurer un bilan positif. En 2010, la police avait révélé que certains lutteurs pariaient illégalement sur des matchs de base-ball et de mah-jong. De même, deux responsables d’écuries de sumo auraient fourni de bonnes places à des membres de la pègre : pendant plusieurs années, des cadres du Kodo-kai, un gang affilié au Yamaguchi-gumi, la principale organisation criminelle japonaise, eurent accès aux tokuto, des sièges très recherchés car proches du dohyo. Aujourd’hui, le sumo est en quête d’un renouveau qui devra sans doute passer par l’émergence d’un champion nippon. Un espoir que les analystes espèrent déceler avant chaque tournoi. En vain jusqu’à présent.

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