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« Les Comores ne peuvent devenir un pays touristique sans électricité… »

​Transformer et moderniser le tissu économique et entrepreneurial aux Comores: les chainons manquants et les perspectives nationales

Renforcer et développer les infrastructures productives
Les infrastructures productives sont cruciales à la création d’un environnement économique incitatif et de confiance devant à terme permettre le redressement et la relance économique du pays dans les buts d’accroitre les investissements directs étrangers, encore limités à ce jour, et de contribuer à créer des emplois pour la population.
Les infrastructures existantes sont vielles et inaptes à soutenir la croissance accélérée souhaitée. Beaucoup des infrastructures en place datent des années 70 et 80, et ont besoin d’être réhabilitées, remplacées ou reconstruites à nouveau. 
La vision emmargée est de doter à terme le pays des infrastructures les plus à la pointe dans les domaines routiers, portuaires, aéroportuaires, scolaires, touristiques, hospitaliers, pour que les Comores renforcent leur compétitivité sous régionale et deviennent une destination prisée pour les investissements directs étrangers, le tourisme et les affaires en général. 
Le premier défi à relever demeure celui de l’énergie dont la fourniture est présentement aléatoire et insuffisante. Le pays consomme, avec ses 782 000 habitants, 27 MW en pleine capacité, alors que les iles Fiji, avec la même population, 800 000 habitants, consomme 800 MW dont 400 MW sont fournis par l’énergie hydraulique.
Le pays est classé au 187ème rang sur 192 pays sur la liste des pays par consommation d’énergie au KW. La fourniture régulière d’énergie est un premier louable pour revenir à la capacité maximale du pays. Une étape devra aussitôt être franchie pour après développer dans la foulée les infrastructures requises mirant à anticiper le développement attendu, concernant en autre le tourisme, l’industrialisation, et la croissance accélérée du pays.
Les Comores ne peuvent devenir un pays touristique sans la perspective de fournir une électricité abondante, bon marché et permanente. La fourniture d’énergie ne doit pas conditionner le potentiel de développement ni de croissance du pays. Au contraire, c’est le potentiel de croissance et de développement du pays qui doivent conditionner les investissements à faire dans le domaine de l’énergie grand public et professionnel.
Le pays dispose de la possibilité d’accroitre significativement son parc et son mixte de production énergétique, par le recours notamment aux énergies renouvelables solaires, géothermiques, éoliennes, biomasses, etc. 
Il lui faudra pour ce faire revaloriser sa politique nationale énergétique dans le but de donner plus d’accent aux énergies renouvelables, en visant notamment à libéraliser la production et à la place assurer plus efficacement la commercialisation.

Régionaliser et localiser le développement 

Les Comores sont un ensemble géographique unique avec des potentialités régionales multiples du fait du de la diversité de ses paysages et de l’aménagement potentiels des iles de Ndzuwani, Mwali et Ngazidja, en pôle de croissance spécifique. 
A l’instar de Dar Salaam, Zanzibar et Arusha en Tanzanie, ou de Durban, Cape Town et Johannesburg/Pretoria en Afrique du Sud, ou encore de New York, Miami et Washington aux Etats Unis, les Comores ont aussi la possibilité de respectivement créer des pôles dominants de croissance industriels et économique à Ndzuwani, touristiques à Mwali, et administratif et financier à la Ngazidja.
Une telle mesure aiderait à mieux canaliser les investissements directs étrangers, à travers une politique nationale d’investissement soutenue, équitable et visionnaire, et à œuvrer en même temps à la prospérité et égalité des chances dans les trois iles, dans le contexte de l’équilibre des iles et de la lutte contre l’instabilité politique.
Ndzuwani a le bénéfice de présentement détenir le port international à eau profonde. Des investissements conséquents pourraient être effectués pour agrandir ledit port ou en construire un autre plus grand, dans le contexte de création d’une Zone Franche d’Exportation Portuaire. L’ile dispose pareillement de la possibilité d’y investir dans les énergies renouvelables dont les énergies hydrauliques, éoliennes et solaires, pour fournir aux industries locales naissantes et aux zones d’exportation une énergie abondante bon marché.
Mwali, le grenier de l’archipel, a le potentiel d’accueillir des stations balnéaires de rang mondial au vue de ses plages, de son parc marin et de son relief géographique. L’ile peut rivaliser avec les Maldives, Seychelles, Zanzibar Nosy be, etc. Des investissements conséquents devront être alloués à cet égard aux niveaux de la production d’’énergie, des transports maritimes et aériens, pour accommoder la croissance accélérée en perspective et rendre Mwali aisément accessible par avion et par bateau à moindre cout.
Ngazidja, en sa stature et ses potentialités géographiques, est notablement bien placé pour servir de plaque tournante du tourisme de luxe et d’affaire, et aussi accueillir les sièges administratifs des nouveaux investisseurs et de place financière pour le pays.
Lesdits dispositifs militeraient à terme pour l’accroissement des échanges entre les iles, la lutte contre le séparatisme, et la baisse notoire des transports inter-iles aériens et maritimes, dont les bénéfices retomberaient sur la création d’emploi, l’augmentation du tourisme et le développement durable des trois iles concernées.

Renforcer l’environnement des affaires

Les Comores sont classées au 154ème rang du rapport de Doing Business de la Banque Monde. Le pays a fait un bond de 5 places par rapport à 2015 où il était classé au 159ème rang mais a régressé par rapport à 2008 où il était classé au 147ème rang mondial. L’électricité, le permis de construire, la protection des investisseurs, le paiement des taxes, le respect des contrats, l’accès au crédit et la résolution de l’insolvabilité, constituent les points majeurs qui affectent le classement favorable du pays. 
Le classement Doing reconnait toutefois un bon classement aux Comores en ce qui concerne les échanges avec l’extérieur. Un bon signal pour les investisseurs intéressés à contribuer à faire des Comores un pays d’exportation et/ou de réexportation. Les autres points du classement devraient cependant faire l’objet de nette amélioration, notamment en ce qui concerne l’électricité, la protection des investisseurs, le respect des contrats, et l’accès au crédit, qui sont vitaux à la prise de décision des investisseurs potentiels.
Le pays a rejoint en 2015 le Multilateral Investment Guarantee Agency (MIGA), filiale assurance politique de la Banque mondiale, en tant que 179ème membre. L’adhésion au MIGA permet aux investisseurs directs ‘étrangers de bénéficier de couvertures des risques politiques liés à l’inconvertibilité de la monnaie, la restriction des transferts, l’expropriation, la guerre, le terrorisme, les troubles civils, la rupture de contrat, et le non-respect des obligations financières.
La couverture des risques commerciaux et opérationnels peut pour sa part être garantie par l’adhésion des Comores à l’African Trade Insurance Agency (ATIA) dont les couvertures portent sur les transactions de compagnie à compagnie, l’insolvabilité non légale des débiteurs pour les banques, les fournisseurs et les contractants, le portefeuille de prêts, d’acheteurs et de débiteurs, le risque de crédit court terme de moins d’un an, et les recevables.
ATIA et MIGA ont de plus signé en 2003 un partenariat de collaboration et de travail en commun en Afrique pour l’accroissement des investissements directs étrangers dans le continent, se basant les complémentarités des deux agences dans la couverture des chaines de risques des investisseurs et entrepreneurs intéressés à travailler en Afrique.
En améliorant ses instruments de garantie et ses conditions légales pour la conduite sereine des affaires, les Comores se donneraient de très grande chance de devenir une destination mondiale et régionale des IDE. L’opportunité est d’autant plus grande que certains pays ont atteint ou sont en train d’atteindre leur niveau de maturité économique les obligeant à délocaliser une partie de leurs activités à faible valeur ajoutée. C’est le cas par exemple de la Chine, de ;’Ile Maurice, de la Tanzanie, de l’Afrique du Sud, de la Malaisie, de Singapour et de l’Oman.
Les Comores pourraient donc tirer profit du principe élargi et renouvelé du « vol des oies sauvages » dont le fondement est le transfert partiel et graduel desdites activités de la part des pays émergeants et en voie de développement.

Privilégier le Partenariat Public Privé

L’Etat a un grand rôle à jouer dans la stimulation économique et la relance du pays. En sus de son rôle de régulateur et de concepteur de politique incitative, le gouvernement peut participer à la diversification et à la résurgence de l’économie du pays par le renforcement du Partenariat Public Privé dans la création de nouvelles entreprises porteuses et la facilitation des investissements directs étrangers dans les domaines des infrastructures productives.
Ledit partenariat peut porter sur les Coopératives un Village Un Produit que l’état pourrait mettre en place avec les communautés et les jeunes dans les préfectures sur financement des bailleurs de fonds dont le Japon, concepteur et promoteur du modèle. L’état garantirait aux communautés ciblées l’assistance technique requise à l’identification des activités porteuses au niveau des préfectures et leur porterait garant pour l’acquisition des financements bancaires nécessaires auxdites activités.
L’état peut aussi aider à l’émergence de nouvelles filières de croissance en créant de nouvelles sociétés d’état à revendre au privé après rentabilisation et consolidation, ou en sollicitant le privé à former des Joint-Venture dans les secteurs qui demandent un fort apport initial de capital. Il peut de la même façon faire un appel identique aux capitaux étrangers dans les domaines notamment de l’énergie, de la santé, de la gestion aéroportuaire et portuaire, de l’hôtellerie, des transports aériens et maritimes, de l’immobilier et de l’éducation.
La démarche devrait permettre ainsi à l’état de diversifier dans un premier temps ses sources de revenus dominés par les taxes douanières, de créer des emplois par millier et d’envoyer de signaux marqués de son ouverture à l’investissement local et aux investissements directs étrangers.
Dans les cas des partenariats locaux, l’État devra envisager de pleinement privatiser ou rétrocéder à terme les sociétés où elle est participante, et signer dans le cas des partenariats internationaux des contrats de cession de type BOT (Construction – Exploitation – Transfert) et/ou DBFO (Concevoir – Construire – Financer – Exploiter), selon les cas, les scénarios et les circonstances.
Le pays peut s’assurer par le biais desdits arrangements et dispositifs de plus efficacement diversifier son économie et d’accélérer sa croissance économique et sa transformation structurelle sans encombre et sans contrainte financière majeure à court et à long terme. Ce sont ces modèles qui ont permis à de nombreux pays dont l’ile Maurice, les Seychelles, le Rwanda, la Malaisie d’emboiter le pas vers leur émergence à bref échéance.
Le partenariat peut également être institué au plus haut niveau de l’Etat par la mise en place du Conseil Présidentiel Consultatif, regroupant comme c’est le cas au Rwanda, les éminences publiques et privées locales et internationales au fin d’échanger, de discuter et d’orienter le Chef de l’Etat sur ses projets, priorités et ambitions nationales.

Accroitre la formation professionnelle et la franchise

L’attraction des IDE supposent le recours à une main d’œuvre qualifiées et bon marché. Le système éducatif est en perte de vitesse aux Comores avec une pléthore de jeunes formés et mal formés dans les institutions locales et dans les pays en voie de développement. Ces jeunes ont pour la plupart des niveaux de qualification faibles et parfois inadéquats par rapports aux besoins de l’économie et de son évolution future en tant que pays à future croissance accélérée.
Le pays devra impérativement importé à court terme une main d’œuvre étrangère qualifiée pour répondre au défi de compétitivité imposé à court terme par la course à la mobilisation des IDE et former à l’identique la main d’œuvre locale, notamment dans les domaines de l’hôtellerie, de la santé, de la restauration, du génie civil et du génie mécanique, sans être exhaustif.
L’Etat devra faciliter et privilégier le Partenariat Public Privé avec les instituts de renommée mondiale dans les domaines pour ouvrir des centres sur place. Il devra aussi encourager l’implantation et l’acquisition par les nationaux des franchises étrangères dans les domaines de l’agroalimentaire, la restauration, les services, la transformation, l’industrie, etc.
Les franchises étrangères constituent un levier rapide de transfert de technologie et de connaissance qui permettra au pays de créer des emplois mais aussi de garantir leur pérennité. 
Les Comoriens pratiquent déjà la franchise dans les assurances et la finance (western union, moneygram, express money, etc.). Un développement plus accru de la franchise aiderait à parallèlement augmenter le sérieux, le professionnalisme et l’encadrement commercial des Comoriens habitués à évoluer à travers des normes managériaux, commerciaux et technique moins exigeantes et impropres au marché mondial.


L’Etat comorien devrait à ces titres faire développer une politique nationale de promotion et d’implantation des franchises internationales dans le pays à travers la mise en place de mécanismes de financement appropriés, la protection des contrats et le renforcement des capacités, dans les but de créer un tissu de PME avancé, rentable et performant pour l’économie du pays.
Abdoul Anziz Said Attoumane

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