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Lettre à… François HOLLANDE

Monsieur François HOLLANDE
Président de la République française
Palais de l’Elysée
55 Faubourg Saint Honoré
75008 Paris

Monsieur le Président,   

Tout comme vous, je suis une élue de cette belle République, la République de France. Et, tout comme vous, j’en éprouve la plus grande des fiertés.

C’est, en effet, une fierté indicible que d’être l’émanation des valeurs républicaines qui ont érigé les libertés fondamentales en principes intangibles et indérogeables, pour le respect desquels la France a tant lutté, lui valant d’être perçue par le monde entier comme la patrie des Droits de l’Homme.

Je crois de toutes mes forces en ces valeurs de Liberté, d’Egalité et de Fraternité qu’incarne notre Marianne et qu’il m’appartient également d’incarner en tant qu’élue.

C’est parce que je porte au plus profond de moi-même ces valeurs et les droits fondamentaux qui en sont les corollaires, que j’ai le cœur ensanglanté de voir la situation qui prévaut, depuis plusieurs années à Mayotte, département français situé à environ dix mille kilomètres de l’Hexagone.

Comment, Monsieur le Président, ne pas être indigné et meurtri face à cette comptabilité macabre de plusieurs milliers d’êtres humains qui, depuis 1995, périssent quotidiennement dans le bras de mer séparant l’Ile de Mayotte des autres iles de l’Archipel des Comores, faisant de l’Océan Indien l’un des plus grands cimetières marins du monde ?

Est-t-il possible qu’en ce moment même et ce, depuis plusieurs mois, sur ce territoire de la République française, des êtres humains, oui des êtres humains, en majorité des femmes et des enfants, soient l’objet d’une véritable « chasse à l’homme » du seul fait qu’ils sont originaires d’une autre Ile de l’archipel des Comores et donc perçus comme des étrangers ?

Est-ce vrai que de nombreux collectifs de villageois, organisés, munis de bâtons, de pierres et de machettes, font irruption dans les habitations de ces « étrangers », habitations qu’ils détruisent ou incendient, expulsant les occupants qui sont ensuite victimes d’exactions et des pires actes d’humiliation ?

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Est-il permis de croire, que ces actes de barbarie sont commis au vu et au su des autorités françaises, au premier rang desquelles le Représentant de l’Etat, autorités qui ont été préalablement informées, en décembre 2015, de l’intention clairement exprimée par ces collectifs de remédier eux-mêmes à ce qu’ils qualifient d’immigration clandestine ?

Il eut été impossible de croire à tout cela sans les informations précises et concordantes relayées par les médias et les dénonciations portées avec force par des organisations telles que la CIMADE ou Médecins du Monde ainsi que les insoutenables images circulant sur les réseaux sociaux.

Je vous invite, Monsieur le Président, à consulter chacune de ces sources et bien d’autres encore pour que vous mesuriez la réalité de ce qui se déroule à Mayotte.

Tout comme moi et tant d’autres, vous prendriez alors conscience que la situation a atteint un paroxysme tel qu’il est à redouter que ces « chasse à l’homme », par leur enchaînement, ne conduisent à l’innommable, à l’inhumanité absolue comme ce fut le cas en 1994 au…Rwanda !

Nous ne pouvons accepter que l’irréversible soit commis. Il est temps que cette situation, qui a trop duré, cesse immédiatement et que l’ordre ainsi que l’état de droit soient rapidement rétablis sur le territoire de Mayotte ; que les valeurs de la République ainsi que le respect des droits les plus fondamentaux y soient effectifs.

Le contexte humanitaire qui prévaut à Mayotte ne fait pas honneur à la France et rend méconnaissable le visage de La Marianne, que ce contexte a enlaidi par de purulentes verrues.

Monsieur le Président, il est impérieux et urgent que l’Etat intervienne pour protéger celles et ceux dont la sécurité est menacée faute de quoi, le pire pourrait survenir.

Il s’agit ensuite, après avoir répondu à l’urgence, qu’une réponse adéquate soit enfin donnée aux réels et légitimes problèmes qu’endurent depuis plusieurs années la population mahoraise, confrontée à d’inquiétantes difficultés sociales et sécuritaires, lesquelles sont à l’origine de la situation actuelle.

Cette réponse ne pourra venir qu’en réunissant, dans un cadre de coopération fraternelle et cette fois-ci utile, les élus mahorais, l’Etat comorien ainsi que l’Etat français.

Car ce n’est qu’à travers un véritable dialogue, qui exigera des concessions de part et d’autre, que l’on pourra rétablir une paix sociale et durable à Mayotte et parvenir à l’apaisement dans les relations entre ces frères de l’Archipel des Comores et plus largement dans la zone de l’Océan Indien.

Ce dialogue, pour qu’il soit fructueux, devra d’une part, nous conduire à nous interroger en toute objectivité sur les raisons qui poussent, depuis plusieurs années, des milliers de ressortissants Comoriens à se rendre, avec tant de détermination et au péril de leur vie, sur l’Ile sœur de Mayotte et, d’autre part, nous amener à dégager des solutions concrètes et dignes visant à mettre un terme à cet afflux continuel.

Convaincue que la présente lettre retiendra toute votre attention et appellera une réaction de votre part, je vous prie, Monsieur le Président, de croire en l’expression de ma respectueuse et républicaine considération.

Mme Faouzia ABOUBACAR BEN-VITRY

Elue de la République Française

Copie de la présente à :

    M. Manuel VALLS
    Mme George PAU-LANGEVIN
    Mme Ericka BAREIGTS

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