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Marchés publics : Silence, on truque ! (alwatwan)

Multiplication des marchés de gré à gré, versement de commissions et de retro-commissions, surfacturations, dessous-de-table,… les appels d’offres peuvent donner lieu à des tours de passe-passe entre entreprises et décideurs, à des violations manifestes des normes de transparence et d’équité. Al-watwan Magazine a mené l’enquête sur le système de passations de marchés publics.

La nouvelle Autorité de régulation des marchés publics (Armp), seul organe officiel chargé de veiller à la régularité des passations des marchés, aurait été saisie d’un seul dossier d’appel d’offres depuis sa mise en place le 31 mai 2012. Pourtant, plus d’une centaine de contrats ont été signés entre temps. Un peu plus d’un an après la promulgation de “la loi sur les marchés publics et délégation des services”. Les vieilles pratiques semble avoir la peau dure. On ne le dira jamais assez: les marchés publics constituent, dans une large mesure, un univers à part, hermétique et opaque, où, de nombreuses fois, on contourne les règles, fausse le jeu de la libre concurrence contre, souvent, espèces sonnantes et trébuchantes. Multiplication des marchés de gré à gré, versement de commissions et de retro-commissions, surfacturations, dessous-de-table,… les appels d’offres donnent lieu, souvent, à des tours de passe-passe entre entreprises et décideurs, à des violations des normes de transparence et d’équité. Lors de la clôture du dernier séminaire gouvernemental, le chef de l’Etat avait, lui-même, pointé du doigt, les pratiques malsaines en cours au sein de l’administration en s’appuyant sur l’exemple d’une grosse entreprise publique.
Appels_d_offres
“Etat dans l’Etat”

“La multiplicité des contrats occultes ainsi que certains investissements que réalise cette société sans que le gouvernement en soit saisi laissent penser qu’on est face à un Etat dans l’Etat”, avait déclaré ce jour-là Ikililou Dhoinine. Dans la société alors visée par le chef de l’Etat, les changements d’équipements ou de fournisseurs obéiraient rarement à des impératifs techniques. A chaque nouvelle direction générale, ses nouveaux fournisseurs avec, à la clé, une pile de contrats, toujours traités à la même sauce du gré à gré. Le phénomène se perpétue au nez et à la barbe de tout le monde.

“Migration technologique”

Souvent des équipements d’une valeur de plusieurs milliards de francs sont remplacés au pied levé avec de nouveaux équipements commandés, chez d’autres fournisseurs. Parfois malgré les réserves émises par les techniciens qui craignent les conséquences de cette “migration technologique”.

Royaume de l’impunité

Selon Ibrahim Abdourazak, directeur des Nouvelles technologies à Comores Telecom, par exemple, “l’essentiel est d’améliorer toujours plus les prestations pour satisfaire les usagers”. Autrement dit, le reste n’est que futilités. Interrogé sur les tenants et les aboutissants de certains contrats, ici comme ailleurs, il s’est contenté de lâcher: “C’est de la cuisine interne”. Il faut dire qu’après le classement sans suite de plusieurs dossiers brûlants qui impliquaient de très hauts responsables de sociétés publiques, certains se sont sentis pousser des ailes. Cependant force est de constater qu’aucune entreprise n’a le monopole de la transgression de la loi. On assiste souvent, dans plusieures entreprises, à des passations de marchés publics frappées du sceau du conflit d’intérêts.

Liens très étroits

La société qui s’est vue attribuer le projet de construction d’un canal de drainage des eaux de pluies au Centre hospitalier El-Maarouf, financé à près de 300 millions de francs par l’Agence de coopération internationale de Japon (Jica), aurait, par exemple, profité des liens très étroits de ses responsables avec l’autorité compétente. Cette même société assure la maîtrise d’ouvrage de bâtiments en construction au profit de l’administratration publique. Auparavent, elle avait raflé le marché relatif à l’extension des bureaux de Comores Telecom. Que dire du projet de construction et d’équipement d’un bloc opératoire à El Maarouf, financé par la Banque islamique de développement à hauteur de 141,921 millions de francs et remporté par deux sociétés dont l’une intervient, pourtant, dans un tout autre secteur, celui de la pharmacie?

Procédures viciées

Le président de l’Union des chambres de commerce, d’industrie et d’agriculture des Comores ne s’est pas trompé en appelant le chef de l’Etat à mettre de l’ordre dans le système de passations des marchés publics aux Comores. “Il y a un aspect de la gouvernance qui nous interpelle tous, Monsieur le président, et qui intéresse plus particulièrement le secteur privé, en l’occurrence les procédures de passation des marchés publics qui continue à être ignorées et bafouées malgré l’adoption et la promulgation du code”, avait déclaré Fahmy Thabit.

Kamardine Soulé/ alwatwan

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