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Mayotte : la France doit assumer seule sa responsabilité dans une crise qu’elle a créée

Lundi, le ministère français des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur des Comores à Paris pour lui faire part de sa préoccupation. Cette préoccupation vient d’une décision du gouvernement de l’Union des Comores. Le 22 mars dernier, la France a décidé d’affréter un bateau pour envoyer vers Anjouan des personnes capturées à Mayotte et désignée comme clandestins. Les Comores ont refusé d’être les complices d’une telle opération et ont refusé de laisser acoster ce bateau, car conformément au droit international, un citoyen comorien est chez lui à Mayotte. Le bateau est donc revenu à son point de départ.

Comme les personnes à bord ne pouvaient plus être incarcérées dans un centre de rétention, elles ont été emprisonnées dans un gymnase à Pamandzi. Cela a entraîné une manifestation de rejet à laquelle ont participé des élus mahorais, mettant en avant leur qualité de Français qui sont dérangés par l’utilisation d’un équipement sportif à d’autres fins. La colère n’était pas dirigée contre la France, mais contre le gouvernement des Comores.

Une fois de plus, la France cherche à échapper à sa responsabilité dans une crise qu’elle a créée de toute pièce. C’est en effet Paris qui a pris la décision de ne pas respecter le résultat du référendum d’autodétermination de 1974. Conformément à la Constitution, les citoyens de l’ex-Territoire d’outre-mer des Comores ont été consultés pour savoir s’ils voulaient sortir de la France. Leur réponse a été très claire : ils se sont prononcés à une large majorité pour l’indépendance. La France a alors pris prétexte d’un vote contraire dans l’île de Mayotte pour y maintenir son administration. Il suffit de se rappeler comment la France n’eut de cesse de manipuler le suffrage universel pour obtenir des résultats conformes à son objectif. Les Réunionnais sont bien placés pour le savoir, avec des votes qualifiées d’ « élections à l’algérienne » dans les années 1950-1960 marquée par des fraudes massives et des violences. Ce qui pose bien sûr la question des conditions dans lesquelles fut obtenu le « résultat » du scrutin d’autodétermination à Mayotte en 1974.

La décision de la France eut pour conséquence de diviser les Comores en deux. De cette division résultent les milliers de morts causés par l’application du « visa Balladur » qui empêche la libre circulation entre les îles de l’archipel des Comores, et les multiples coup d’État organisés par d’anciens officiers de l’armée française pour destabiliser le jeune État comorien.

Dans ces conditions, la convocation de l’ambassadeur des Comores par la France montre combien il est difficile pour l’ancienne puissance coloniale de rompre avec ses vieux démons. C’est au contraire à la France de rendre des comptes et de prendre les mesures nécessaires pour régler une crise qu’elle a créée toute seule.

J.B / temoignages.re

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