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« Mr le Président, vous héritez d’un pays en lambeaux, l’eau et l’électricité sont devenues des luxes »

Adresse au Président élu, Azali Assoumani.
L’arrêt de la Cour Constitutionnelle du 15 mai 2016 a consacré votre élection à la présidence de l’Union des Comores avec 41, 43 % des voix. Pour la deuxième fois depuis la mise en place de l’Union des Comores, vous accédez à la magistrature suprême après avoir présidé la destinée de ce pays 7 ans durant de 1999 à 2006. Vous avez mis en place les institutions de l’Union issue de la constitution du 23 décembre 2001, il vous appartient maintenant de les consolider et de les renforcer pour qu’elles soient au service de la population.  Vous n’êtes pas sans savoir que ces nouvelles institutions ont alourdi l’administration et fait exploser la masse salariale. Votre devrez inviter le plus vite possible les nouveaux Gouverneurs des iles afin d’harmoniser les champs d’intervention des exécutifs de l’Union et des iles avant la nomination des Ministres de l’ Union et les Commissaires des iles. Les conflits de compétence entre l’Union et les iles autonomes qui ont miné votre précédent mandat ne  doivent plus refaire surface. La réforme de la constitution du 17 mai 2009 qui détermine les compétences des iles, doit servir de base de discussion avec les Gouverneurs des iles afin d’apaiser et de clarifier les  relations  entre l’Union et les iles.

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Excellence, Monsieur le Président, vous héritez d’un pays en lambeaux. L’eau et l’électricité sont devenues des luxes, la population à l’exclusion des plus démunis qui n’ont pas le choix, fuit nos hôpitaux qui sont devenus des mouroirs et nos écoles publiques qui accueillent le plus souvent les délaissés de la Républiques. Les routes sont délabrées et plusieurs zones du pays demeurent inaccessibles… Conséquence, la population  fuit massivement le pays à leur risque et périls.

Votre slogan de campagne était «  Le Président de tous » et vous devriez être le Président de tous les Comoriens de l’intérieur et comme ceux de l’extérieur. Ne vous laissez pas enfermer dans le sectarisme et le népotisme. Entourez-vous d’une équipe honnête, intègre qui n’est pas mouillée dans la gestion calamiteuse des biens et des deniers de l’Etat.  Vos premières nominations seront un signe envoyé à la population. Elles devront être guidées par le respect de la loi et la promotion de l’excellence. Les meilleurs d’ entre nous sont invisibles dans l’administration comorienne. Cette élite qui est pourtant chouchoutée ailleurs est marginalisée, dans  son propre pays. Conséquence, plusieurs d’ entre eux ont préféré exercer leurs talent ailleurs et surout en dehors du pays.  Le pays ne favorise pas malheureusement l’excellence dans les nominations aux postes stratégiques de prise de décision, dans le recrutement dans la fonction publique, dans les établissements publics et les sociétés d’Etat. Ces nominations demeurent malheureusement  partisanes, régionalistes et ne font pas recours à des critères de compétence, de probité d’intégrité et d’honnêteté. Le pays a besoin de son élite pour sortir de la situation catastrophique dans lequel il se trouve.  Cette élite doit être employée dans l’administration, dans les sociétés d’état et les établissements publics. Les nominations dans ces sociétés d’état établissements publics doivent dorénavant respecter la loi du 02 janvier 2006, portant réglementation générale des Sociétés à capitaux publics et des établissements publics, une loi promulguée par décret du 07 février 2007.  L’article 9 de cette loi  adoptée durant votre précédent mandant et que vous n’aviez pas promulgué dispose que « les Directeurs Généraux des sociétés nationales et des établissements publics à caractère industriel et commercial nationaux sont nommés par le Président du Conseil d’Administration après délibération dudit Conseil ».  Vos successeurs ont toujours violé cette loi et nommé des amis politiques. Il est temps de laisser le pouvoir de nominations aux Conseils d’administration et de veiller à des recrutements qui respectent les critères de compétence, d’éthique  et d’intégrité.

Excellence, Monsieur le Président, l’Etat est faible et inexistant dans plusieurs parties du territoire national. Vous devriez par conséquent renforcer l’autorité de l’Etat et veiller à la présence effective de ses structures administratives sur l’ensemble des îles. Les symboles de l’Etat doivent être visibles partout. L’autorité de l’Etat ne peut s’affirmer sans une réforme profonde de la justice.

La lutte contre la corruption constitue l’autre défi majeur de votre mandat. La corruption tue ce pays et contribue à la déliquescence, à la dégénérescence de l’Etat, à l’affaiblissement des valeurs fondamentales de la société et à la dégradation des mœurs. L’arbitraire, le favoritisme, la suspicion et la délation se sont installés en règle absolue dans cette société. L’opprobre est jeté sur toute la société et la classe politique. Vous devriez être intraitable sur cette question. Vous devrez sévir.

Sur le plan économique, vous devriez veiller à la mise en œuvre rapide de la Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable  2015-2019. Il appartient à l’Etat de s’approprier des différents programmes contenus dans ce plan d’action mis en œuvre avec le concours des partenaires au développement et tirer les leçons des échecs du précédente stratégie de développement : le Document de stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté (DSCRP) qui a été initié par vous.. La déclaration de Paris de 2005 sur l’aide au développement que vous connaissez bien, devra vous guider dans vos actions avec les partenaires au développement. Cet engagement international pour l’amélioration de l’efficacité de l’aide prône l’appropriation. Et cette appropriation, c’est la capacité du pays à exercer une réelle maîtrise sur ses politiques et stratégies de développement et à coordonner les actions de développement. Le pays ne doit pas continuer à subir les orientations des partenaires au développement. Il doit s’affirmer et veiller au suivi et á l’évaluation des actions en développement. Ainsi la pauvreté de la population pourra être réellement réduite.

En outre, pour redynamiser le secteur privé, vous devriez relancer le programme de privatisation des entreprise publiques en vue notamment d’augmenter les ressources budgétaires de l’Etat par la cession des participations de l’Etat, d’augmenter la productivité et la compétitivité des entreprises privatisées, de favoriser l’émergence d’une épargne locale à travers la création d’un actionnariat national et surtout de garantir la fourniture régulière des services de qualité afin d’assurer le bien-être de la population. L’Etat ne peut pas continuer à vouloir assurer les services d’achat du riz, du carburant, de vendre l’électricité, de fournir les services des télécommunications etc…Il a d’autres préoccupations importantes qui sont l’éducation, la santé et la protection de la population.

Excellence Monsieur le président

Restez fidèles à votre famille et alliés politiques. Ne coupez pas le pont avec ceux qui vous ont porté au pouvoir en s’associant avec ceux qui vous ont combattu.  Les chefs de l’Etat qui ont adopté des revirements politiques dans le passé au cours de leurs mandats, ont payé cher de cette absence de loyauté vis-à-vis de leur famille politique.

Excellence, Monsieur le Président, bonne chance et qu’Allah bénisse les Comores !

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