Les chiffres de la pauvreté aux Comores parlent d’eux-mêmes : 42,4 pour cent de la population, soit trois cent vingt mille personnes, vivent dans le dénuement. La consommation mensuelle réelle par habitant est en dessous du seuil national de pauvreté. Environ 18 pour cent des personnes vivent en dessous du seuil international de pauvreté, fixé à 1,9 dollar par habitant et par jour. Malgré les déclarations incantatoires des autorités nationales, tous régimes politiques confondus, la pauvreté ne cesse de gagner du terrain.
Et tout porte à croire que la situation ne s’arrangera pas de sitôt. En 2013, les Comores occupaient la cent soixante-neuvième place sur cent quatre vingt six pays avec un Indicateur de développement humain (Idh) de 0.429. Il était de 0.433 deux ans plus tôt. Autrement dit, de 2011 à 2013, notre pays a plongé dans les abysses du classement.
Selon la dernière enquête sur le budget des ménages réalisée en 2014, l’archipel compte 42,4 % (soit près de 320 000 personnes) de pauvres avec une consommation mensuelle réelle par habitant en dessous du seuil national de pauvreté, sachant que la population est estimée à 806 153 habitants en 2016. Environ 18 % de la population vit en dessous du seuil international de pauvreté fixé à 1,9 dollar par habitant et par jour (exprimé en parité de pouvoir d’achat pour l’année 2011).
Comment peut-on expliquer ces contre-performances ? «Les raisons sont simples : l’absence d’un Etat fort, dynamique, la non intégration de l’économie nationale dans l’économie mondiale et surtout l’absence d’innovation en matière de protection sociale. L’expérience des pays africains qui ont investi dans la protection sociale, notamment l’île Maurice, démontre que des programmes ciblés aux plus pauvres, réduisent sensiblement l’extrême pauvreté et favorisent la croissance économique. Malheureusement, aux Comores, les programmes de protection sociale sont à l’état embryonnaire.
Prévoyance sociale
Certes une politique nationale de la protection sociale a été validée par le gouvernement en novembre 2007, mais dans les faits, cette politique nationale de la protection sociale n’a pas été accompagnée d’une stratégie de mise en œuvre», écrivait l’administrateur au bureau de l’Unicef à Moroni, Ismael Saadi. Il regrette que «les programmes de protection sociale aux Comores se soient réduits aux prestations fournies par la Caisse nationale des retraites, la Caisse nationale de prévoyance sociale ou encore les maigres pensions de réversion et celles versées aux handicapés.»
C’est ainsi que, constate-t-il, «les personnes âgées meurent dans l’indifférence totale faute de revenus et de soins. Les indigents et les plus vulnérables n’ont pas accès aux services sociaux de base et ne bénéficient d’aucun programme de transfert de fonds pour les aider à se nourrir.»
De 2013 à ce jour, le niveau de pauvreté s’est empiré. Selon le Fonds monétaire international (Fmi), les recettes fiscales n’ont représenté que 11,1% du Pib en 2015 et pourraient atteindre 9,8% en 2016, représentant moins de 40% des ressources totales du gouvernement. Les dépenses budgétaires sont en hausse, poussées par la masse salariale de la Fonction publique qui absorbe presque l’intégralité des recettes fiscales en 2016.
On pourrait comprendre cette explosion des dépenses publiques si, au moins, elles visaient à alléger le fardeau des couches les plus vulnérables à travers des mesures sociales. Ce qui est loin d’être le cas. Autrement dit, pendant que les pays riches disposent de filets sociaux de sécurité pour soutenir les familles pauvres et doper la consommation, l’Union des Comores est dépourvue de toute politique d’assistance de ce genre et préfère ignorer une partie de ses réalités socio-économiques.
Nazir Nazi
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