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Qui assure la sécurité sur les sites gaziers et pétroliers algériens ?

Photo du site gazier d'In Amenas distribuée par le Norvégien Statoil.

Plusieurs centaines de personnes ont été prises en otage mercredi 16 janvier sur le site gazier d’In Amenas, dans le sud de l’Algérie, exploité par une joint-venture de l’entreprise algérienne Sonatrach avec les compagnies britannique BP et norvégienne Statoil, un complexe qui emploie 700 personnes. Malgré le dispositif de sécurité très strict mis en place, les terroristes ont réussi à neutraliser l’escorte qui accompagnait le bus relayant la base de vie de Tigantourine, où logent les employés, à l’aéroport d’In Amenas, à quelques kilomètres de là. Une opération qui interroge les dispositifs de sécurité mis en œuvre sur ces sites ultra-protégés.

Lire : Le site d’In Amenas, une joint-venture de Sonatrach, BP et Statoil

  • Qui gère la sécurité dans sur les sites pétroliers et gaziers ?

Des dizaines de sites identiques à celui d’In Amenas existent dans le sud de l’Algérie. Ces sites pétroliers et gaziers sont stratégiques à la fois pour l’Algérie – à titre d’exemple, l’usine de Tingantourine fournit 9 milliards de mètres cubes de gaz par an, soit 12 % de la production de gaz algérienne – et à la fois pour les exploitants. C’est pourquoi les autorités algériennes dépêchent des militaires sur place. Là-dessus se greffent les dispositifs des exploitants, c’est-à-dire des sociétés de sécurité, souvent étrangères, qui travaillent en accord avec les autorités, mais ne disposent pas d’armes. « En Algérie, les sociétés de sécurité recrutent d’anciens militaires ou policiers, qui ont l’expérience du terrain algérien. Ces sociétés de sécurité ne sont pas là pour mettre des coups de feu », explique Alain Flandrois, directeur d’études à la DISS, et chargé de la conception de dispositifs de sécurité à l’étranger.

En plus de ces deux niveaux de sécurité très hiérarchisés, les sous-traitants, comme par exemple la société CIS Catering, qui gère l’hôtellerie et la restauration à la base de vie d’In Amenas, doivent assurer leur propre dispositif de sécurité. « En général, ce sont les bases de vie qui sont les plus vulnérables, car elles ont leur propre système de sécurité », commente Alain Flandrois.

  • Quels dispositifs sont mis en place ?

Le niveau de sécurisation des sites pétroliers et gaziers du sud de l’Algérie est beaucoup plus élevé que celui des autres sites algériens, notamment les sites de BTP du nord du pays. D’après M. Flandrois, « ces précautions remontent à plus de quinze ans, au moment où l’Algérie a dû lutter activement contre les attaques terroristes, et dont la priorité a été de sécuriser ces endroits stratégiques ».

Pour assurer la sécurité des centaines de personnes présentes sur des sites qui, pour reprendre la formule de M. Flandrois, ont une superficie de « plusieurs supermarchés », les sociétés de sécurité doivent mettre en place des mesures de contrôle très strictes à valeur contractuelle. « Si les travailleurs ne respectent pas les consignes de sécurité, ils peuvent perdre leur emploi, c’est très important », insiste le directeur d’études de la DISS.

Voir : La carte du site de Tigantourine

Ces sociétés mettent en place un « access control », qui ne permet de rentrer sur les sites qu’aux personnes identifiées, ainsi que des règles de circulation très contraignantes, ou encore une « obligation de discrétion », qui interdit aux employés de parler de leur travail. « On met généralement en place quatre niveaux d’alerte, comme pour le plan Vigipirate, souligne le spécialiste de la sécurité, avant d’ajouter : Mais sur des sites aussi immenses, en plein désert, il est difficile d’assurer une étanchéité complète. »

Lire : Le plan Vigipirate ‘rouge renforcé’, un dispositif courant

  • Quels précédents ?

La dernière prise d’otages d’envergure dans le Sahara algérien date de début 2013, quand le mouvement islamiste algérien GSPC, le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, avait enlevé en plusieurs groupes 32 touristes venus d’Allemagne, de Suisse, des Pays-Bas et d’Autriche. Mais jamais des groupes terroristes n’avaient encore osé s’attaquer aux sites gaziers et pétroliers qui fleurissent dans le désert du sud de l’Algérie, ces sites encadrés par des dispositifs de sécurité extrêmement élaborés. « Aujourd’hui, nous assistons à un événement exceptionnel. Il n’y a jamais eu de prises d’otages de cette envergure sur un site stratégique comme In Amenas », souligne Alain Flandrois.

Un étonnement partagé par Régis Arnoux, le PDG de CIS Catering, une société qui s’occupe de la restauration et de l’hôtellerie des sites pétroliers dans le monde entier, qui expliquait sur Europe 1 que « cela fait plus de dix ans qu’on opère dans ce pays. Ce genre d’incident n’est intervenu à aucun moment. C’est une zone extrêmement bien protégée de l’Algérie ».

Pour autant, Alain Flandrois refuse de jouer les Cassandre : « Il ne faut pas rentrer dans la psychose, assène-t-il. Cette attaque a valeur de symbole. C’est un peu comme le World Trade Center, le genre d’attaques qu’on ne fait qu’une fois, afin de jouer l’effet de surprise à fond », veut-il rassurer.

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