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Réformes de la constitution : et si l’on en parlait ensemble à cœur ouvert ?

En décidant de procéder à une réforme constitutionnelle, le Président Azali est parfaitement dans son rôle, en vertu de l’art 42 de la Constitution. Force est, toutefois, de constater, pour le déplorer, que l’initiative divise profondément. L’opposition et une partie de la société civile sont contre : ils accusent le Chef de l’Etat de vouloir supprimer le système de la présidence tournante et de mettre fin à l’autonomie des îles, avec au final l’intention de s’emparer des principaux leviers de l’Etat et de s’éterniser au pouvoir. La contestation monte, et enfle. Ces derniers jours, la grogne s’est même invitée au sommet de l’Etat. En effet, au cours d’un rassemblement politique organisé samedi 17 juin, lendemain de l’Ide el-Fitre, le Vice-président de l’Union, DJAFFAR Ahmed Said s’est longuement exprimé pour marquer sa différence par rapport aux récentes initiatives du Chef de l’Etat relatives à la CC et au référendum constitutionnel annoncé. Dans son intervention, le VP DJAFFAR, toujours en fonction a carrément accusé le Président de violer la Constitution ; un crime de lèse-majesté en fait perpétré par le VP perçu pourtant comme étant le plus proche du Chef de l’Etat. De l’inédit !

Juriste et ancien PG de la République, M. DJAFFAR est considéré comme l’intellectuel du Gouvernement.

Loin de moi, l’idée macabre de jouer les alarmistes, mais, le pays semble en voie de renouer avec la dangereuse spirale des troubles et de la violence, rythmée par le binôme explosif manifestation/répression.

Face à cette situation pour le moins préoccupante pour l’unité nationale et la paix civile, une brève rétrospective s’avère nécessaire et s’impose à nous tous. Souvenons-nous en effet : la Constitution de décembre 2001, objet de la réforme constitutionnelle en question a été portée par l’ensemble du peuple comorien, comme un seul homme, depuis son élaboration et son approbation dans l’Unité et dans le consensus national. D’autre part, on ne le soulignera jamais assez, la configuration géographique spécifique de notre pays – un archipel formé de quatre îles – implique que toute décision majeure qui engage durablement le destin commun du peuple comorien, fasse au préalable l’objet d’une large concertation, avant d’être approuvée et adoptée dans l’unité et le consensus national.

De ce fait, tirant leçons et conséquences de ces deux brefs rappels, et servi par une riche longue expérience en matière de gouvernance, le Président Azali, et lui seul, est à même de prendre toutes les initiatives nécessaires pour empêcher le pays de sombrer dans un chaos imprévisible. Au centre de ces initiatives, la nécessité de requérir et de s’assurer de l’implication agissante, inclusive des forces politiques et des acteurs de la société civile, dans une démarche de concertation et de dialogue constructif sur l’opportunité ou non de procéder à la réforme constitutionnelle en gestation. Certes des recommandations dans ce sens ont été émises lors des assises de février dernier, cependant ces recommandations sont perçues comme clivantes par une partie de l’opinion. Nous sommes donc devant un cercle vicieux qu’il faut impérativement briser. Pour le Président Azali, il s’agira là d’un acte fort de courage qu’il accomplira. Mais l’unité nationale et la paix civile valent bien un tel acte fort de courage de la part du Président.

Dans l’affirmative, l’on mettra au point les modalités de porter ensemble, entre comoriens, la réforme en gestation. Unis, les comoriens sont en effet en capacité de bâtir une réforme constitutionnelle à la fois efficiente et consensuelle. Le moment venu, j’apporterai ma modeste contribution aux débats sur la réforme en question. En attendant, je souhaite émettre mon point de vue sur une disposition qui focalise actuellement toute l’attention, à savoir la durée du mandat du Président de l’Union. Chacun sait en effet, que la proposition d’un mandat de cinq ans renouvelable une fois divise ; je suggère donc que le Président de l’Union soit élu pour un mandat unique de sept ans non renouvelable ; c’est ce qu’on pourrait appeler « partager la mangue en deux » puisqu’aux Comores nous ne produisons pas de poires.

S’agissant de la réforme constitutionnelle en gestation, elle sera forcément médiane et limitée dans le temps ; chacune de ses dispositions doit transcender les clivages. La réforme conduira le pays jusqu’au terme du cycle de la présidence tournante ; d’ici là, l’unité nationale sera profondément enracinée et fortement consolidée. Les comoriens seront alors prêts et à l’aise pour se doter d’une constitution unitaire viable et fiable que nous appelons tous de nos vœux.

Abdoulmadjid Youssouf (Ancien ministre, ancien membre de la cour constitutionnelle) / LGDC

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1 commentaire sur Réformes de la constitution : et si l’on en parlait ensemble à cœur ouvert ?

  1. M. Abdoulmajid votre article est bon mais vous n’êtes pas brillant car vous êtes comme tous les juristes de ce pays, des politiciens ! Donner le plein pouvoir à un président sur 7ans dans un pays où sur 40ans n’a progressé que de 2 sur une échelle possible de 8, c »est vraiment aberrant, même le Cap Vert, (l’un des pays pauvres avec les Comores, Bangladesh, Mali, etc) nous a dépassé. On constate l’enrichissement de certains (quelques amis politiques, son entourage et c’est tout). Et vous venez nous dire qu’il faudra instituer un septennat. Vous êtes fou comme tous les intellectuels comoriens !

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