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Société nationale des postes et services financiers (Snpsf) : Dans le tourbillon des détournements de fonds

L’affaire de détournement de plus de 560 millions de francs à la Société nationale des postes et services financiers (Snpsf), qui a éclaté en juin 2011, constitue l’un des plus grands scandales financiers au sein d’une entreprise publique aux Comores. Alors que l’on s’attendait à ce que la banque postale se dote des moyens de se mettre à l’abri d’une arnaque de cette ampleur, les malversations sont devenues depuis, presque,… une seconde nature sans que cela semble émouvoir les responsables de la société. Difficile à ce jour de chiffrer le montant exact de tous les préjudices subis par la Snpsf. Watwan’Eco, revient sur toutes les affaires qui ont éclaboussé l’entreprise ces cinq dernières années.

Par Mariata Moussa

Nous sommes en juin 2011. Un scandale financier secoue la Société nationale des postes et services financiers (Snpsf). Plus de 560 millions de francs comoriens sont disparus des caisses de la banque. Sont pointés du doigt deux receveuses, l’informaticien régional et des complices.

Ce scandale financier comporte deux volets : le premier, porte sur la «falsification des pièces comptables», orchestrée par les receveurs cités plus haut, avec un préjudice estimé à plus de 327 millions de francs (dont près de la moitié a été détournée à partir des recettes principales du bureau de Moroni Rp). Le deuxième volet a trait au «détournement de fonds» proprement dit, perpétré par l’informaticien régional de la société pour un montant de 236,477 de francs.

Cet informaticien transférait l’argent qu’il subtilisait vers des comptes de deux amis, ses complices. Dans un premier temps, il a viré sur le compte du premier la somme de 153,977millions de francs. Sur le même mode opératoire, il a viré 82 autres millions sur le compte de son second ami.

Aussitôt l’affaire découverte, une information judiciaire a été diligentée afin de faire toute la lumière sur ce qui s’est réellement passé. Selon le procureur de la République de l’époque, «l’enquête a révélé qu’en 2009, 120 millions se sont évaporés des comptes de la Snpsf ; en 2010, une importante somme a aussi disparu. J’ai décidé de poursuivre la personne censée contrôler cet argent». Cette enquête n’a rien donné jusqu’ici.
 
Même mode opératoire

Rebelote, en avril 2013. La banque postale saisit, alors, la justice pour une affaire de détournement de fonds. Elle met en cause le receveur principal, ainsi poursuivi pour avoir détourné 8 millions de francs. Cette fois, le mode opératoire est différent. Il s’agit tout simplement d’un hold-up.

En effet, le vendredi 11 octobre, deux hommes se sont introduits dans les locaux de l’agence située sur la place de France à Moroni pour emporter les recettes de la journée, soit la somme de 18 millions de francs. Ils ont ligoté la receveuse, qu’on soupçonne d’avoir été de mèche avec les malfaiteurs.

alwatwan actu imageLes enquêteurs ont procédé à l’interpellation de la receveuse et de deux hommes. Après plusieurs mois de détention provisoire, la présumée auteur et commanditaire de cet hold-up a réussi à quitter le pays. Ces malversations financières portées devant le tribunal s’ajoutent à de nombreux dossiers internes, qui auraient été réglés entre quatre mûrs et dans la plus grande discrétion.

Pétaudière 

Ce sont souvent des faits de «caisses incomplètes» dont les auteurs sont tenus de rembourser selon une échéance fixée en commun accord. Ces «petits scandales» sont devenus tellement banales qu’ils ne semblent choquer personne, s’inquiètent des agents. L’absence de sanctions à l’encontre des auteurs de ces détournements de fonds semble avoir donné des idées à d’autres agents qui se sont engouffrés dans la brèche.

C’est ainsi qu’en avril, le chef de la chambre de compensation de la Snpsf  a été pris la main dans la caisse. Le préjudice de ce dernier dossier est estimé à 350,050 millions de fc. L’argent détourné a été transféré vers des comptes extérieurs (la Meck, en l’occurrence). Le compte qui a servi de transit appartenait à un client de la banque postale décédé il y a dix ans.

Devant le tribunal, l’intéressé a reconnu avoir détourné de l’argent. «J’ignore combien, je pense que même la Snpsf, elle non plus, n’en connait pas le montant. Je n’étais pas contrôlé. S’il y avait le moindre contrôle, l’affaire n’aurait pas duré dix ans, tout aurait été découvert en 2008», a-t-il dit. Tout y est dit.
Autrement dit, la Snpsf, cette banque où émargent tous les agents de l’Etat, n’est donc rien qu’une pétaudière. 

Chercherait 6 milliards pour recapitalisation

En 2012, une issue était sur le point d’être trouvée entre le gouvernement comorien et l’émirat du Qatar, en vue d’une ouverture du capital de la branche financière de la société. Les Qataris devaient, vite, se retirer du processus après les conclusions d’une “étude-diagnostique’’ sur l’état de santé de la société. A l’heure actuelle, au ministère des Finances, on pense, sérieusement, à l’adoption d’un plan de sauvetage de l’entreprise publique.

Des informations concordantes font état d’un besoin urgent d’environ 6 milliards de francs pour permettre à la Société nationale des postes et services financiers, la Snpsf, de se recapitaliser et d’investir. Ce serait, dit-on, la conclusion d’un comité d’experts mis sur en place pour éplucher les comptes de la banque postale.
Ce qui est sûr, c’est qu’au ministère des Finances, on pense déjà à l’adoption d’un plan de sauvetage de l’entreprise publique. Il faut dire qu’à la Snpsf, les affaires de détournement d’argent se suivent et se ressemblent (Lire l’article de Mariata Moussa).

En faite, la société traverse cette zone de turbulences depuis plusieurs années. Pourtant, en février 2012, une issue était sur le point d’être trouvée entre le gouvernement comorien et l’émirat du Qatar, en vue d’une ouverture du capital de la branche financière de la société. Mais, les Qataris se sont vite retirés du processus, peu après les conclusions d’une “étude-diagnostique’’ conduite par le cabinet Ernst & Young sur  l’état de santé de la société.

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Cette volonté d’ouverture du capital répondait à un impératif, après le constat du conseil d’administration de la Banque centrale des Comores (Bcc) sur les difficultés de la Snpsf. Les autorités bancaires nationales avaient, ainsi, demandé expressément à ce que l’entreprise prenne toutes les mesures, sur le plan financier et organisationnel, pour se conformer aux normes bancaires nationales.

«Le principal objectif a été le redressement de la société, mais à cela s’est ajouté la question de la restructuration, qui doit aboutir à la mise en place d’une banque postale rentable, filiale de la Snpsf», avait déclaré la directrice générale de la Snpsf, Mariama Ahmed Abdou, à l’occasion de la célébration, la même année, de la Journée mondiale de la poste. La Snpsf a été créée en février 2004 suite à la scission des activités de la Société nationale des postes et télécommunications (Snpt).   Ks

Alwatwan 

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