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Violences à Mayotte : Mouigni BARAKA écrit une lettre ouverte à l’Imam AZALI

Monsieur le Président,

Notre Constitution vous confère la charge suprême de garantir l’unité nationale et de défendre l’intégrité territoriale des Comores. Mayotte est une île des Comores. Et la situation grave, qui prévaut dans cette partie de notre territoire national occupé, interpelle notre conscience que nous devons, en conséquence, agir vite et ensemble.
Car les autorités françaises laissent faire la politique de chasse, de refoulement et de rafle des Comoriens à Mayotte, considérés comme des « étrangers » sur leur propre sol. Gendarmerie, Police de l’Air et des Frontières françaises sont mobilisées avec leurs équipements (radars, vedettes, menottes, etc.) contre des enfants, des femmes, des hommes qui n’ont rien contre le peuple français, mais contre la politique de colonisation d’un autre âge qui doit être banni des esprits.

L’occupation de Mayotte que les dirigeants français considèrent comme un droit est perçue comme un acte pur et dur aux conséquences inimaginables et incalculables, insupportables et condamnables. La France détient la clé pour déverrouiller les issues fermées par elle-même.

L’amitié entre les peuples de France et des Comores existe depuis très longtemps, s’accordent à dire déjà historiens et politologues. Or, cela ne suffit pas aujourd’hui à faire plier la France qui s’impose toujours à Mayotte, cette île qui n’est pas la sienne. La « déclaration d’amitié » France-Comores, signée le 21 juin 2013 à l’Elysée, ne respecte pas les frontières de quatre îles de l’Etat comorien, indépendant depuis le 6 juillet 1975.
Il a été dit partout dans le monde que : « Mayotte fait partie intégrante des Comores. La population des quatre îles des Comores est homogène, elle a la même langue, la même religion, les mêmes mœurs et coutumes ». C’est une réalité historique, culturelle et spirituelle que personne ne conteste ; C’est une évidence confirmée par l’admission des quatre îles – Mayotte, Mohéli, Anjouan, Grande Comores – depuis le 12 novembre 1975 au sein des Nations Unies.

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L’occupation de l’île comorienne de Mayotte, véritable contentieux entre les deux Etats souverains comorien et français est inacceptable. Le juge international qu’est l’Organisation des Nations Unies (ONU) et les instances régionales, telles l’Union Africaine (UA), la Ligue des Etats Arabes, et d’autres encore, ont usé de la force du droit, des dogmes et principes selon lesquels les pays colonisés, accédant à l’indépendance, « héritent les frontières issues de la colonisation ». Et la France, fait fi toujours de cette nette et claire réalité historique, piétine la Charte des Nations Unies et elle se place au-dessus de tous les Etats.

La France continue à faire subir les Comoriens toutes les atrocités et humiliations semblables à celles qui ont engendré la guerre en Algérie. Les récentes expulsions de familles entières de leur lieu d’habitation et leur interdiction de séjour à Mayotte suivent une trajectoire dangereuse de guerre coloniale qui ne dit pas son nom.
Monsieur le Président,
Au cours de votre premier mandat présidentiel, vous aviez engagé, en 2005, des discussions directes avec le Président Jacques Chirac. Et lors de votre investiture, le 26 mai 2016, vous avez affirmé que « la solidarité de notre relation et la préservation des intérêts des deux pays nous obligent à la lucidité pour un règlement durable de la question de Mayotte ». C’est la raison pour laquelle l’action du peuple comorien doit être forte pour déjouer le piège tendu, au-delà de la déclaration dite « d’amitié France Comores » du 21 juin 2013.

En votre qualité de garant de l’unité nationale des Comores, vous ne devez pas accepter une pratique de division et de diversion orchestrée par la puissance coloniale. Et vous ne devez pas vous laisser entraîner par ceux-là mêmes, Français et Comoriens, qui veulent tout aplatir. Les résolutions votées par l’ONU, depuis 1975, exigent que la France réintègre Mayotte dans son ensemble naturel comorien. Mais, la France, membre du Conseil de Sécurité de l’ONU, opte pour le déni du droit international et couronne l’injustice par : l’impensable statut de départementalisation de Mayotte, à partir du 29 mars 2009. Ce statut qui remplace l’ancien de « collectivité territoriale au sein de la République française », constitue pour la France un nouvel acte d’ancrage qui fait exacerber les tensions et crimes.
On peut facilement s’apercevoir que ce statut de départementalisation est un acte qui sape le droit international, bafoue la Personnalité comorienne et la dignité de tout un peuple qui se fait piétiner, alors que l’amitié, qui unit les peuples français et comorien, ne doit être ni un point de marchandage ni un tremplin pour humilier l’Etat souverain des Comores.
Les Comoriens, interrogés ici et là, parlent d’actes de sape de l’unité des Comores par la France ; et les élus de Mayotte n’ont ni des états d’âme ni des doutes, dès lors qu’ils sont assurés que « Mayotte c’est la France ». Il y a une volonté bien réelle de garder l’île de Mayotte sous occupation française, puisqu’elle est intégrée depuis 2014, au sein de l’Union européenne, en tant que région ultrapériphérique.
Par solidarité, l’Union européenne qui passe dorénavant de vingt-huit à vingt-sept pays membres – la Grande Bretagne s’est récemment retirée de l’Union par référendum – considère que « Mayotte appartient à la France » au mépris de la communauté internationale qui réaffirme le droit de l’Etat comorien de disposer des frontières issues de la colonisation. Trop de coups bas entourent la revendication de Mayotte, ce contentieux « désagréable » entre la France et les Comores.
Monsieur le Président,
Aucun Président ne doit gérer tout seul ce problème épineux qui doit mobiliser toutes les forces du pays. Les Comoriens unis, pouvoir et opposition, doivent mener ce combat juste, face au colonialisme agressif et aliénant. Et ce sont tous les fondements historiques, politiques et juridiques de la lutte de libération nationale, pour recouvrer l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale, qui nous dictent de soumettre à Vous, Président nouvellement élu, les propositions suivantes :
– Convoquer une session extraordinaire des députés en août 2016 pour adopter une résolution qui doit servir de base du dialogue du Groupe de Travail de Haut Niveau France Comores ;
– Engager le dialogue entre les Comoriens afin d’aboutir à instaurer les contacts utiles et les liens directs avec nos frères et sœurs de Mayotte ;
– Associer les membres de l’opposition au sein du Groupe de Travail de Haut Niveau France Comores pour faire ensemble le suivi du dialogue ;
– Réintroduire la question de l’occupation de l’île comorienne de Mayotte à l’ordre du jour de chaque Assemblée Générale de l’ONU à New York, sur la base de la résolution 1514 (XV) adoptée le 14 décembre 1960 et qui stipule dans son article 6 ceci : « Toute tentative visant à détruire partiellement ou totalement l’unité nationale et l’intégrité territoriale d’un pays est incompatible avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies ».
Vous rappelant la base de la pratique internationale à portée universelle qui oblige les anciennes puissances tutrices à respecter les frontières héritées de la colonisation, nous vous assurons, Monsieur le Président, de notre engagement patriotique pour la réintégration de l’île de Mayotte dans son cadre naturel et historique comorien.

Moroni, le 24 juin 2016
Mouigni Baraka Said Solihi
Ancien gouverneur de l’Ile Autonome de Ngazidja
Ancien Candidat à l’élection présidentielle

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1 commentaire sur Violences à Mayotte : Mouigni BARAKA écrit une lettre ouverte à l’Imam AZALI

  1. Le problème de Mayotte ,moi chaque fois j’ai dit que nos autorités sont responsables de cette situation car puisque la france ne nous considére pas un état souverain nous devons hausser le ton en la disant que Mayotte est une terre comorienne établissons entre v. des visas pour la france.

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