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Le maraboutisme ou la dernière ligne de défense du colonel Azali

Contribution: Les dés sont jetés. Avec l’atroce assassinat du Major Hakim, la dictature d’Azali a atteint un point de non-retour. Les détails glaçants sur les circonstances du meurtre du Major Hakim, étouffé avec un sac plastique mis dans la tête, et de l’inhumation de son cadavre, nonobstant toute considération du rituel musulman, donnent du crédit à ceux qui croient qu’Azali est prêt à tout pour accaparer le pouvoir. Le dictateur comorien est dangereux car c’est un homme à la fois trop suspicieux et trop superstitieux. Il n’est pas non plus besoin de sagacité d’esprit pour constater que l’obsession du pouvoir l’a aussi rendu narcissique. Ce n’est un secret pour personne qu’à l’approche du 26 mai, sa paranoïa le pousse à enfourcher son cheval de bataille qu’est la magie noire est-africaine. Car, machiavélique qu’il est, la fin justifie les moyens. Pour Azali, la fin c’est le pouvoir pour le pouvoir, même s’il nuit aux intérêts de l’État et de son peuple. De quoi donner raison à Albert Camus lorsqu’il tourne en dérision Machiavel par cette question : Si la fin justifie les moyens, qu’est-ce qui justifie la fin ? Un bon sujet de dissertation pour le baccalauréat, soit-dit en passant.

Pour la petite histoire, d’aucuns n’hésitent pas à voir dans les pratiques sataniques et la sorcellerie du colonel Azali l’explication des disparitions en cascade de nombre d’opposants dont : l’ancien Premier ministre Ibrahim Halidi, l’ancien directeur général de l’autorité portuaire Mohamed Djaffar, le lieutenant-colonel Hassan Haroun, son ancien ami de la CENI le docteur Djaza, etc. Les marabouts du manitou lui auraient-ils prescrit le sacrifice d’êtres humains, comme nombre de citoyens le pensent ? Dans tous les cas, le gouvernement usurpateur n’a pas d’arguments à faire valoir pour justifier le silence et l’inertie du parquet vis-à-vis des assassinats ciblés du Major Hakim, de Fayssoil et ses frères d’armes. Ce déni de justice équivaut à une haute trahison dont il conviendra un jour ou l’autre de sanctionner les auteurs. Quant au maraboutisme, il faut arriver à en finir avec de telles perversions qui gangrènent la société à tout point de vue : moral, religieux ou même économique. En dépit des excès et des injustices commis sous son règne, Ali Soilihi était fondé à déclarer la guerre à certaines coutumes rétrogrades, notamment ces pratiques de maraboutisme qui vicient la foi des musulmans et les appauvrissent encore davantage. De là à dire qu’Azali et Ali Soilihi sont incomparables, il y a un pas que l’on peut franchir sans la moindre hésitation.

Maintenant, je pense que la meilleure façon d’opérer une révolution en la matière, ou d’autres réformes sociétales comme le mariage traditionnel, le moyen indiqué est la loi et non le dictat. Comme je l’ai écrit dans mon premier livre ( Gouverner un État vulnérable…, p.127) « Si, au lieu de faire consensus, cette politique de réforme est scellée dans le dictat, alors là ‘’bonjour les dégâts’’, car il y a beaucoup de chances qu’elle soit un jour ou l’autre remise en cause et appelée finalement à disparaître. » Dans la mesure où elle requiert l’adhésion des citoyens ou de l’opinion, la démocratie s’avère le meilleur système pour mener durablement des réformes de société et nous éviter des retournements de situation analogues aux scènes surréalistes consécutives à la chute du régime soilihiste. C’est là encore une autre démonstration de la pertinence du mot de Winston Churchill : « La démocratie est le pire des systèmes à l’exception de tous les autres ».

Youssouf Boina

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