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Le risque de démutualisation du réseau Meck

La réforme nouvelle du secteur bancaire impose une approche capitaliste ou commerciale du microcrédit. En fixant un capital social minimum plus élevé, cette reforme a mis les banques commerciales en compétition directe avec les banques coopératives (IFD) qui ressentent de plus en plus le besoin de se refinancer sur le marché de capitaux, car l’épargne qu’elles mobilisent n’est pas assez stable pour financer leurs investissements. Il ne suffit pas non plus pour une banque coopérative d’avoir de l’épargne nécessaire pour pouvoir accorder des prêts à ses membres. Le recours à des fonds propres devient aujourd’hui nécessaire pour suivre la croissance de son portefeuille crédit.

En effet, une banque coopérative doit être viable financièrement. Cela implique que les prix de ses services de microfinance doivent non seulement couvrir ses coûts mais générer des excédents (bénéfices) qui doivent être mobilisés sous forme de réserve impartageable et augmenter les fonds propres de l’institution dans l’optique d’autofinancer les futures investissements. Ce qui explique souvent les mesures fiscales dérogatoires que les Etats en développement accordent aux Institutions de Microfinance (IMF) pour réduire les coûts inhérents à la taille de leurs acticités et permettre leur performance sociale.

Cependant, la nouvelle loi bancaire a omis les mesures incitatives nécessaires aux activités de microfinance et soumet les IFD aux dispositions du code général des impôts (article 93), ce qui n’est pas le cas dans la zone de l’UEMOA (leader des activités de microfinance en Afrique) où la réglementation des Systèmes Financiers Décentralisés (SFD) prévoie un régime fiscal dérogatoire de droit commun en faveur des institutions coopératives d’épargne et de crédit (IMCEC). Ainsi, force est de constater qu’un régime fiscal unique du système bancaire défavorise les IFD car les buts poursuivis ne sont pas les mêmes, et l’adoption de ce genre de réglementation, mettant en cause l’approche subventionnée du microcrédit, ne tienne pas compte des particularités de leur forme coopérative.

La nouvelle reforme bancaire a rendu le réseau MECK hors normes ; seule la MECK-Moroni répond actuellement aux exigences de fonds propre. Du coup, face à un problème de solvabilité, le réseau n’aura pas d’autre recours que de se démutualiser au risque de se voir retirer à moyen terme son agrément et céder les actifs des caisses respectives au profit des capitalistes. Cette réforme constitue une menace de démutualisation des IFD. Et de cette évidence, le réseau MECK devient la cible des investisseurs étrangers qui manœuvrent pour s’en approprier le capital.

Mohamed Abdoul Bastoi

Expert Certifié en Microfinance

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