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Portrait de la députée Hadjira Oumouri : Elle est femme, née le 8 mars journée internationale de la femme, sage-femme de

Mon premier contrat de travail après ma formation de sage-femme c’est avec l’UNFPA. J’ai été recruté en 1995 en tant que motivatrice pour la planification familiale dans la région de Mbadjini. Il y avait des problèmes dans les régions sur l’utilisation des produits contraceptifs il fallait aller sensibiliser les populations.

Voulez-vous vous présenter madame la députée ? 

Je m’appelle Hadjira Oumouri, née le 8 mars 1969 à Foumbouni dans le sud de Ngazidja aux Comores. Après avoir réussi mon bac, j’ai fait une formation de sage-femme. Donc je suis sage-femme de formation. Je me suis beaucoup investie sur la vie associative et j’ai beaucoup milité dans les associations féminines notamment le Réseau Femme Nationale et Développement. J’ai même créée une association dans ma région de Mbadjini appelée « Femme En Mouvement » qui réunissait toutes les couches des femmes jeunes et adultes de la commune d’Itsahihi où j’étais nommée maire à l’époque des délégations spéciales. 

De ces expériences, j’ai décidé de ne pas me limiter dans le monde associatif et j’ai pris l’initiative d’entrer en politique. J’ai adhéré au parti RIDJA où j’ai milité pendant 7 ans avant d’intégrer le parti RDC (Rassemblement Des Comores) qui m’a présenté aux élections législatives de 2015 dont je suis élue députée actuellement. 

Ce qui m’a motivé c’est ce que j’ai vu qu’il y a eu beaucoup des inégalités à l’égard de la femme. Beaucoup de femmes n’avaient pas de voix, elles ne participaient pas dans les débats politiques, je voyais peu de femmes à se mobiliser.

Je me suis dit si j’adhérais à un parti politique je vais donner un exemple aux autres femmes mais aussi représentais les femmes quelque part en tant que femme leader. Dans le parti RDC j’occupe le poste de secrétaire régionale de Ngazidja. Je me suis battue vraiment pour être candidate car il y avait des hommes de la région qui voulaient se porter candidats mais j’ai eu le soutien des militants, des adhérents mais aussi les femmes de la région qui m’ont soutenue massivement pour gagner les élections. 

 L’Assemblée Nationale est dominée par 32 hommes sur 33 députés, vous êtes la seule femme, comment faire pour entendre votre voix ? 

Je pense que je me fais entendre. On n’est pas dans un combat de ring où je ne peux pas me battre. Il s’agit de donner ses idées, j’arrive à m’exprimer, à donner mes idées et à représenter pleinement la femme ici à l’assemblée. On vit ensemble, il n’y a pas de discrimination, chacun peut exprimer ses idées à sa façon. La cohabitation est facile avec les hommes. Au contraire ils m’encouragent, ils m’accompagnent dans toutes mes actions. 

J’ai remarqué que je suis la deuxième députée femme élue après madame Sittou Raghdat Mohamed. Il n’y a jamais eu d’autres femmes députées. Plusieurs facteurs expliquent la non représentativité des femmes dans les postes électifs et nominatifs. Les partis politiques n’acceptent pas de présenter les femmes en tant que femmes pendant les élections. 

Je me suis dit si nous arrivions à avoir une loi qui peut soutenir la femme ça serait une grande avancée. C’est une façon aussi de motiver les femmes, de se réveiller d’aller militer dans les partis politiques. 

Pour vous dire les femmes sont découragées et se disent que faire de la politique aux Comores ça ne sert à rien il n’y a que les hommes qui gagnent toujours et sont souvent privilégiés. 

En effet, la loi que j’ai initiée, prône que les nominations dans le pouvoir de l’Union comme ceux des îles respectent la « proportion de 30% du genre » mais aussi qu’aux élections de représentants de la Nation et des Conseillers des îles, les candidatures présentées par les partis et mouvements politiques  ne soient « recevables » que si elles représentent « 30% du genre ».

Si on arrive à mettre en application cette loi et avoir ce pourcentage dans les postes électifs et nominatifs il aura un grand changement car dans les prochaines élections.  Nous allons vulgariser la loi, sensibiliser les femmes à prendre part dans les prochaines élections et inciter les partis politiques à accepter de présenter les femmes dans les listes de candidatures. Je pense que les prochaines élections plusieurs femmes vont s’y présenter. 

Même dans les postes nominatifs, vos constatez qu’il y a une seule ministre femme dans le gouvernement. Est-ce que c’est suffisant ? Je ne crois pas. Pour faire le plaidoyer il nous faut un outil légitime de plaidoyer. Cette loi vient à point nommée faire l’objet d’un outil de plaidoyer auprès des décideurs. Nous ferons le plaidoyer auprès du chef de l’Etat et des gouverneurs pour les postes nominatifs de respecter au moins ce quota pour les femmes.

Quelles sont vos expériences en tant que sage-femme et militante associative ?

Mon premier contrat de travail après ma formation de sage-femme c’est avec l’UNFPA. J’ai été recruté en 1995 en tant que motivatrice pour la planification familiale dans la région de Mbadjini. Il y avait des problèmes dans les régions il fallait aller sensibiliser les populations. J’ai bénéficié aussi d’une formation en technique de communication avant de commencer ce travail. 

Après ce contrat j’ai travaillé en tant que sage-femme dans la maternité de Foumbouni dans ma région. En 2001 j’ai été recrutée en tant que directrice de la clinique d’ASCOBEF (Association Comorienne pour le Bien-être de la Famille) jusqu’à 2014. 

Pendant cette période j’ai eu à bénéficier de plusieurs formations initiées et organisées par l’UNFPA notamment une formation en santé de la reproduction à l’Île Maurice, des  formations sur les nouvelles méthodes contraceptives comme les formations à l’insertion, la localisation et au retrait de l’implant, … Je remercie beaucoup au passage l’UNFPA qui m’a donné toutes ces opportunités. 

Je suis membre aussi de la plateforme des femmes en politique Océan indien Comores (PFPOI COM). Nous travaillons étroitement avec nos collègues de Madagascar et de Maurice. On a une présidente très motivée  qui est active dans les activités. D’ailleurs nous comptons utiliser cette plate-forme pour vulgariser la loi sur la promotion du genre. 

Vous êtes nominée pour recevoir le prix humanitaire de parlement panafricain sur l’excellence en leadership et le plaidoyer en matière de genre, quelle lecture faites-vous de cette distinction ?  

C’est un prix initié par le parlement panafricain depuis 3 ans. Il octroie des prix à des personnes qui ont fait des actions dans leurs pays respectives. « Le prix humanitaire panafricain sur l’excellence en leadership et le plaidoyer en matière de genre » me revient cette année grâce notamment à la proposition de loi sur le genre et son adoption ainsi que celle sur le harcèlement sexuel.

Cette loi a fait  écho au niveau du parlement panafricain. C’est ce qui a motivé le parlement de voir qu’aux Comores il y a quelqu’un qui représente les femmes, qui a porté la voix de la femme à un niveau supérieur. Le parlement panafricain a considéré en tant que leader et avocate du genre que je mérite d’être primée pour honorer et valoriser la femme. 

Vous êtes la seule femme au parlement de l’Union des Comores, quelle est votre secret pour fédérer les hommes autour de vous pour voter à l’unanimité vos propositions de loi ?

A vrai dire ce n’était pas facile. Vous savez que les hommes ils aiment bien qu’on travaille ensemble mais prendre leur place c’est difficile. Ils ne cèdent pas leurs places c’est pourquoi il faut aller les chercher et les arracher. J’ai réussi par la communication à mobiliser tous mes collègues députés. J’ai commencé à sensibiliser les membres de la commission des lois qui m’ont accompagné à leur tour pour sensibiliser les autres parlementaires. 

J’ai eu aussi le soutien du président de l’assemblée à qui j’ai demandé officiellement de me soutenir. Il a su mobiliser les autres députés et montrer l’importance de la loi pour motiver les femmes à s’engager en politique. 

Votre mot de fin ?

Je pense que le combat de la femme c’est tous les jours. La politique c’est aussi un combat il faut continuer à se battre. J’aurai aimé que la femme comorienne se réveille et prenne ses responsabilités. 

Propos recueillis par Nasser Youssouf/UNFPA

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